Boutis
Chaque boutis a une histoire et chaque boutis est une œuvre unique, une œuvre d'art. Des plus anciens à ceux encore confectionnés de nos jours, chaque ouvrage raconte la vie de son auteur. Par le choix des tissus, le choix du patron, les symboles qui y sont reproduits et le temps passé à sa réalisation, le boutis est le reflet de la personne qui le façonne. C'est une technique très ancienne, dont les origines remonteraient à la dynastie Han (-200 avant J.-C. à 200 après J.-C.), mais c'est au XVIe siècle que le boutis connaît réellement un essor. Ces pièces brodées en relief, le plus souvent blanches, et en coton, sont alors produites de façon industrielle par des brodeurs professionnels, notamment à Marseille. A partir de là, la pratique va s'étendre dans les foyers provençaux pour devenir au fil des siècles, une tradition familiale qui se transmettra de génération en génération. Jusqu’au XIXe siècle, cette tradition constitue même un rite de passage à l’âge adulte pour bon nombre de jeunes filles qui, dès leur communion solennelle, vers 12 ans, devront confectionner des pièces de boutis pour leurs trousseaux.
Boîte à couture
En cadeau elles recevaient une boîte à couture qu’elles utilisaient tout au long de leur vie pour leurs différents travaux d'aiguille et elles se mettaient au travail. Trois pièces composaient le travail en boutis : un cotillon, un pétasson (petassoun en provençal) et une courtepointe. Le cotillon, ou jupon, était porté par la jeune femme lors de son mariage. Le pétasson, carré de 50 centimètres de côté, servait à langer son enfant. Quant à la courtepointe, elle ornait le lit des époux tout au long de leur vie jusqu'à la mort de sa créatrice dont elle devenait le linceul. Il fallait beaucoup de patience, du cœur à l’ouvrage mais aussi de bons yeux afin de broder ces pièces, riches en symboles. Il faut dire que les jeunes filles, la plupart d'entre elles ne sachant ni lire, ni écrire, y transcrivaient en motifs leur appartenance religieuse, leur état d’esprit et leurs espérances.
Pétasson
Une marguerite n’a pas la même signification qu’un lys ou qu’une narcisse. Le nid avec des oiseaux représente le mariage d’amour, contrairement à la corbeille de fruits. La miche de pain, elle, est brodée par celle qui espère ne jamais manquer de nourriture dans son foyer. Beaucoup d’autres symboles sont fréquents sur les pièces anciennes. Par exemple, le brin d’olivier si cher à la Provence, ou encore la coquille évoquant Saint-Jacques de Compostelle ou bien des étoiles signes de l’hospitalité des Provençaux. Si la symbolique a changé et les pièces confectionnées ont évolué, le travail, lui, reste le même. Avec énormément de patience, et de passion, les boutisseuses d’aujourd’hui reproduisent des heures durant les mêmes gestes que leurs aïeules. Au point que le temps passé sur un boutis est bien souvent incalculable. C’est un travail assidu, de longue haleine, que l’on ne peut réaliser qu’avec passion. Cette passion, qui était auparavant transmise de mère en fille, ce savoir-faire ancestral, se partage désormais dans diverses associations qui sont dédiées à l’art, à la culture et aux traditions provençales. Au sein de ces structures les dames échangent beaucoup entre elles et s'entraident. Si l’une éprouve une difficulté, une autre va l’aider. Elle se donnent des conseils, montrent aux autres comment réaliser telle ou telle chose, tel ou tel point, de telle ou telle façon. Chaque nouvelle venue doit, en premier lieu, réaliser son pique-aiguille. C’est une façon d'apprendre directement la technique, par la confection d’un petit ouvrage, soit à partir d’un patron existant, soit en créant un motif de son choix, selon l'inspiration du moment. Car chaque boutis a pour commencement le dessin d’un patron. Qu’il soit original ou pas, ce dernier est reproduit sur le tissu, le plus souvent du coton, et plus précisément de la batiste, un coton très fin. Le motif souhaité dessiné sur papier, est calqué sur le tissu préalablement découpé. Vient ensuite l’étape du bâti. Il s’agit d’assembler les deux tissus entre lesquels seront, plus tard, enfilés des mèches de coton qui vont permettre de donner le relief au boutis. Ainsi, les deux carrés de tissus sont liés l’un à l’autre. Les boutisseuses peuvent alors piquer au point de piqûre, ou point avant, ces deux étoffes, suivant le dessin préalablement réalisé. Avec cette étape, des parties sont cloisonnées puis mises en bosses grâce à la technique du "bourrage". Sur l’envers du tissu, des mèches de coton sont insérées grâce à une aiguille à bout rond. Il faut parfois des dizaines de mèches, glissées une à une entre les tissus, pour parvenir à l’obtention de l’épaisseur voulue. C’est par une jolie finition sur la bordure entre les deux tissus, que les boutisseuses vont terminer leur réalisation. Chacune de ces étapes nécessite de longues heures de travail.
Boutis au pêcheur
Coussin
La patience et la précision du geste sont donc deux qualités à posséder pour se lancer dans la pratique du boutis. Un véritable boutis n'a pas de valeur financière car tout dépend de la dimension des pièces confectionnées. C'est ainsi qu'un chausson de bébé demande en moyenne 48 heures de travail contrairement à un couvre-lit qui va demander des jours voire des mois de travail assidu. Les belles confections d’aujourd’hui sont davantage décoratives qu'usuelles mais elles n’en demeurent pas moins aussi résistantes. Un véritable boutis est blanc. Ainsi, il peut être bouilli, ou lavé en machine à 60 °C. C’est afin de protéger ce savoir-faire, et lutter contre un emploi abusif du terme "boutis", que plus de trente associations françaises - dont sept varoises -, il faut le souligner, emmenées par l’association France boutis, se sont mobilisées. Rassemblées et entourées d'historiens et de collectionneurs, plusieurs personnes issues de ces structures ont travaillé durant trois ans à la constitution d’un dossier permettant de faire reconnaître cette technique ancestrale. Depuis 2019, le boutis est répertorié à l’Inventaire du Patrimoine Culturel Immatériel en France.
Source : D'après un article du Magazine le Var - Conseil départemental du Var - N°10 Hiver 2020-2021
Courtepointe et coussin
L'association France boutis Accueil - France Boutis a été créée en 2007. Elle compte aujourd'hui plus de 500 adhérent(es). Elle a pour but de promouvoir, partager, transmettre l'Art du Boutis ou Broderie de Marseille. Cette association organise des stages ou des ateliers d'initiation et de perfectionnement au boutis et met en place des expositions d'envergure internationale partout sur le territoire. A également été mis en place le Salon National du Boutis qui se tient tous les deux ans à Caissargues dans le Gard au cours duquel se retrouvent une quarantaine d'exposants.
ENVIRONNEMENT - Le Conseil d’État a rejeté mardi 22 septembre une demande des chasseurs de revenir sur la décision gouvernementale de suspendre la très controversée chasse à la glu, tout en rejetant un recours contre une autre chasse traditionnelle.
Fin août, l’Élysée avait annoncé qu’il ne serait pas accordé pour cette saison de quotas dérogatoires autorisant la chasse à la glu pour les grives et les merles - seules espèces pour lesquelles elle était autorisée.
Cette chasse traditionnelle était depuis longtemps dénoncée par les écologistes et défenseurs des oiseaux et cette décision avait été considérée comme une victoire pour la nouvelle ministre de la Transition écologique Barbara Pompili.
La fédération régionale des chasseurs de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur avait demandé en urgence (référé) à la plus haute juridiction administrative du pays d’enjoindre au gouvernement de revenir sur cette décision et de fixer par arrêté un quota d’oiseaux pouvant être chassés.
Elle arguait notamment qu’un projet de décret mis en consultation par le ministère de la Transition écologique (avant l’arrivée de Mme Pompili) prévoyait initialement d’autoriser cette chasse pour la saison 2020/21.
Mais le Conseil d’État a rejeté cette demande, estimant notamment que la décision est motivée par les doutes de la ministre sur la compatibilité” d’une telle dérogation avec la directive européenne “oiseaux” de 2009. Directive dont le Conseil d’État a précisément demandé fin 2019 à la Cour de justice de l’UE de préciser l’interprétation sur les éventuelles dérogations possibles.
L’interdiction d’autres chasses traditionnelles rejetée
La réponse étant toujours attendue, le juge a estimé que l’urgence invoquée par les chasseurs ne pouvait être retenue “eu égard à l’intérêt général qui s’attache au respect du droit de l’Union européenne” et a donc rejeté la demande.
Ce sont justement ces doutes sur la conformité avec la législation européenne que l’Élysée avait mis en avant pour expliquer la décision de revenir sur l’attribution de quotas.
Le Conseil d’État a par ailleurs rejeté plusieurs autres recours en référé de l’association écolo One Voice contre d’autres chasses traditionnelles, autorisées celles-là par l’État pour la campagne 2020-21: celle de l’alouette aux pentes (filets) et matoles (cages tombantes) dans les départements de la Gironde, des Landes, du Lot et Garonne et des Pyrénées Atlantique; celle des vanneaux, pluviers dorés, grives et merles noirs dans les Ardennes.
Le Conseil d’État a estimé que l’urgence n’était pas caractérisée et a donc rejeté les demandes sans se prononcer sur le fond.
Si aujourd’hui la mobilisation de la Française des jeux met en lumière notre patrimoine matériel, elle interroge sur son contenu et sa capacité à produire une culture commune et une identité en héritage.
Aujourd'hui sera tiré le super loto du patrimoine, une façon populaire de faire participer tous les Français à la restauration et à la sauvegarde 269 monuments en danger. L'idée n'est pas nouvelle car enfant déjà dans les années 60, je suivais l'émission culte de l'ORTF "Chefs d'oeuvres en péril" qui avait permis grâce aux soutiens, aux dons, aux bénévoles et mécènes, de sauver de la ruine ou de la destruction plus de 150 monuments. Si aujourd'hui la mobilisation de la Française des jeux met en lumière notre patrimoine matériel, elle interroge sur son contenu et sa capacité à produire une culture commune et une identité en héritage.
Selon la définition, le patrimoine culturel se définit comme un ensemble de biens matériels ou immatériels porteurs d'une dimension artistique et/ou historique indéniables. Ce patrimoine riche et varié est constitué de paysages, d'architecture, de sites archéologiques, géologiques et industriels, d'espaces agricoles ou forestiers.
Ces biens culturels matériels doivent être préservés, restaurés, sauvegardés et accessibles au plus grand nombre, à l'image de ce qui est fait lors des Journées européennes du patrimoine qui connaissent un engouement jamais démenti.
Malgré la force de ce qu'il représente, notre patrimoine est en danger, en proie aux intempéries et au temps qui passe. À l'étranger, en zone de guerre, un patrimoine universel millénaire est détruit par des fanatiques religieux. Je pense à Palmyre. Immense tristesse d'apprendre également l'incendie ravageur du Musée national à Rio. Que de trésors partis en fumée.
Évitons, ici en France, que notre patrimoine ne tombe en poussière.
C'est d'ailleurs la raison pour laquelle le Président de la République a décidé de confier une mission ambitieuse à Stéphane Bern, fortement engagé sur la question patrimoniale.
"Le patrimoine porte notre histoire, mais il porte aussi une part de notre avenir" a récemment déclaré le Président de la République. Oui, une relation singulière se noue entre les générations de français grâce à ce patrimoine matériel. C'est un héritage légué par les générations qui nous ont précédés, et que nous devons transmettre intact ou augmenté aux générations futures, qu'il s'agisse de la « tour cassée » de Capandula, à Rogliano , du pavillon Lambert pour la reconnaissance du circuit automobile à Geux (Marne) , de l'Hôtel de Polignac à Condom (Gers), qui abrite une des plus belles école publique de France, de la grotte des coquillages de la chapelle des Capucins à Coulommiers (Seine-et-Marne) ou des magnifiques toits de Paris .
Ces édifices et monuments appartiennent aux enfants d'hier, d'aujourd'hui et de demain. En cela, ils relèvent de notre bien public, de notre bien commun. Ils cimentent et sédimentent notre cohésion sociale dans une démarche Intergénérationnelle d'adhésion et d'affiliation. En ce sens ils sont la Patrie de tous.
C'est une culture à préserver, un univers à défendre, une patrie sans cesse renouvelée à condition qu'elle puisse être accessible à tous. Français de souche ou français de branchage. Enfants et adultes sont toujours éblouis par les sites de prestige, souvent désolés par les sites en péril. En ces temps de l'instantanéité, du jetable, des réseaux sociaux, nous avons besoin de repères fixes, partagés et notamment culturels.
Certains, pensent que les crédits mobilisés pour le patrimoine sont des suppléments d'âme, voire du gaspillage qui ne conviennent guère aux périodes de vaches maigres. Quelle erreur. Il s'agit certes, d'honorer un devoir de mémoire et de transmission mais cette valorisation peut également s'avérer un véritable investissement économique. Ce peut être un formidable levier de développement économique et d'attractivité des territoires. La valorisation du patrimoine crée des emplois : pensons aux métiers d'art, qui nouent une relation presque charnelle avec les objets du passé. Le patrimoine bien entretenu peut redynamiser des communes, des villages, ayant perdu un peu de leur souffle, en attirant visiteurs, touristes, curieux et en redéfinissant paysage et activités locales.
Dans ce combat, la société civile est en première ligne. La mission confiée à Stéphane Bern par le Président Macron en témoigne mais le chemin reste long. La mobilisation de chacun est nécessaire: citoyens, élus, associations, acteurs de terrain. Dans ce contexte, les partenariats privés doivent se développer, en complément des fonds publics. Le mécénat d'entreprise est une excellente démarche, à condition bien sûr que les sites publics, ne soient pas confisqués. Évitons toute grille de lecture idéologique et caricaturale sur le sujet. Toute source de financement susceptible de donner une seconde vie à un monument doit être recherchée et je peux en porter témoignage en tant qu'administratrice du Fonds de Paris: grâce à des fonds privés, des monuments parisiens remarquables pourront être restaurés à l'instar les fontaines des Champs-Elysées.
Mais pour être complète sur la question patrimoniale, il faudra ajouter la richesse du patrimoine immatériel séculaire: chants, littérature, coutumes, danses, traditions gastronomiques, jeux, mythes, contes et légendes, métiers d'art, témoignages, documents écrits et d'archives orales et audiovisuelles.
Ces richesses qui portent la trace de notre identité, nos connaissances, nos savoir-faire, notre langue, nos traditions en somme, peuvent également tomber dans l'oubli. Ils sont tout aussi nécessaires pour notre cohésion et notre rayonnement. La France est un phare dans le monde par sa culture, sa langue, sa créativité et sa diversité.
Transmettons aux générations futures cette exception culturelle.