L’observatoire des vers luisants et des lucioles réalise une enquête participative pour connaître les populations de ces insectes lumineux. S’appuyant sur un réseau de 15 000 citoyens, il constate un déclin largement causé par l’humanité.
Tallenay (Doubs), reportage
Trois points brillants dans l’obscurité. La dernière fois qu’Éric Descourvières a aperçu des vers luisants, c’était à la fin du mois de juin, devant sa maison de Tallenay, un village du Doubs. « Je les ai découverts par une belle nuit noire en bordure d’une route communale, en lisière de prairie. Enfant, j’avais l’habitude de les observer. Cela m’a fait plaisir d’en revoir », raconte l’enseignant. Quelques jours plus tard, photo à l’appui, il consignait son observation dans un formulaire en ligne.
En effet, depuis 2015, une enquête participative vise à mieux connaître les populations de vers luisants et de lucioles en France. Souvent confondus, ces coléoptères de la famille des lampyridés diffusent tous une lumière verte pendant l’été. La bioluminescence résulte de la réaction chimique entre deux molécules nommées luciférase et luciférine avec l’oxygène. Rien de diabolique là-dedans : en latin, lucifer signifie « ce qui apporte la lumière ». Chez les vers luisants, cette propriété revient uniquement à la femelle qui, dépourvue d’ailes, reste immobile et s’éclaire en continu pour attirer un mâle. Du côté des lucioles, les deux genres sont ailés et bioluminescents ; ils clignotent en émettant des flashs de lumière très brefs.
Autrefois communs, ces insectes — une douzaine d’espèces en France — ont été peu étudiés. « En fait, on ne sait pas grand-chose sur eux. Ce ne sont pas de jolies bêtes comme les papillons ou les scarabées avec de belles couleurs ; ils n’intéressent pas les entomologistes », regrette Marcel Koken, chercheur en biologie moléculaire au Centre national de la recherche scientifique (CNRS). Ce spécialiste de la bioluminescence pilote l’observatoire des vers luisants et des lucioles avec Estuaire, un groupe associatif vendéen qui a initié d’autres programmes participatifs sur les bourdons, les hérissons, les mares et les libellules.
Compagnons à la fois magiques et mystérieux des soirées estivales, les vers luisants convenaient bien à une enquête destinée à réunir le maximum de contributeurs volontaires. Pour ce type de projet de science citoyenne, mieux vaut, effectivement, miser sur des espèces dotées d’un capital de sympathie. Et cela fonctionne. Grâce au relais local de 169 associations naturalistes, 15 000 observateurs répondent chaque année à la question suivante : avez-vous déjà vu un ver luisant ou une luciole ?
« C’est une enquête grand public à laquelle participent des gens qui ne sont pas dans notre réseau habituel », témoigne Bertrand Cotte. L’entomologiste amateur, coléoptèriste et membre de l’Office pour les insectes et leur environnement Franche-Comté, supervise la collecte de données dans sa région. En Bourgogne-Franche-Comté, 421 observations ont été recensées en 2021, grâce au travail de mobilisation de l’Observatoire régional des invertébrés.
Premier objectif de l’observatoire national : tenter d’évaluer et de localiser les populations. « Tout le monde dit "les vers luisants, on n’en voit plus". Alors on a voulu savoir s’il y en avait vraiment moins ou si c’est le changement de nos comportements qui nous rend moins attentifs », explique Marcel Koken. Résultat : les lampyres n’ont pas échappé au déclin général de l’entomofaune. « Si on se réfère aux anciens récits dans la littérature, il y a une vraie baisse. On ne retrouve plus les quantités décrites dans les articles », constate le chercheur du CNRS. On sait également que la principale espèce en France, Lampyris noctulica, est présente partout, même si la situation est plus dégradée dans le nord du pays. Les lucioles, elles, n’ont été signalées qu’autour de Nice et en Corse.
Des herbes hautes, de l’ombre et un peu d’humidité : c’est tout ce dont a besoin le ver luisant. « Il n’est pas très exigeant. On le trouve dans les jardins, les prairies, les bords de haie, les chemins forestiers, recense Bertrand Cotte. Et il lui faut aussi des limaces et des escargots. » Les larves (que l’on peut observer toute l’année) se nourrissent exclusivement de gastéropodes. Des animaux pourtant plus gros qu’elles, à qui elles réservent un sort funeste. « Ce sont des bêtes féroces, souligne Marcel Koken. Elles se jettent sur leur proie pour la mordre à plusieurs reprises. Le poison injecté la paralyse puis finit par la liquéfier. »
L’appétit de ces coléoptères en fait donc de précieux auxiliaires pour les jardiniers qui se désolent de voir leurs salades englouties par les limaces. L’utilisation de pesticides — et notamment de granulés antilimaces et escargots — apparaît comme l’une des principales causes de raréfaction des vers luisants. « Ils sont aussi perturbés par les lumières nocturnes qui désorientent les mâles. Il faudrait éteindre les lampadaires, les équiper de détecteurs d’approche ou orienter la lumière vers le bas, poursuit le gestionnaire de l’observatoire. L’abus de fauchage a également un impact. L’idéal serait de faucher l’herbe avant la mi-mai, puis après la mi-septembre et essayer de ne pas couper partout si ce n’est pas nécessaire. »
L’enjeu du programme scientifique de l’observatoire des vers luisants et lucioles est double : produire de la connaissance grâce à des contributions citoyennes mais aussi sensibiliser à l’effondrement de la biodiversité et au déclin alarmant des populations d’insectes. « L’enquête aide à communiquer sur une espèce phare pour pointer la régression de l’ensemble des insectes, y compris les plus communs », estime l’entomologiste franc-comtois.
Sauf que les moyens de l’observatoire sont trop limités pour atteindre pleinement cet objectif. Le programme est soutenu uniquement par le Département de la Vendée, ce qui ne permet pas de financer un poste de salarié afin de développer le réseau des observateurs et exploiter la base de données constituée depuis 2015. « Il n’y a pas de modèle économique viable pour ce genre de dispositif, déplore Fabien Verfaillie, le président d’Estuaire. On est frustrés de ne pas accomplir notre mission dans de bonnes conditions. On arrive juste à faire des constats alors qu’on aimerait pouvoir organiser les données de façon à réfléchir à des actions de conservation. »
Un élément pourrait inciter les pouvoirs publics à s’intéresser davantage aux lampyres : la découverte, en 2020, dans les Pyrénées-Orientales, d’une nouvelle espèce de luciole. Originaire d’Amérique du Sud, elle a été introduite en Espagne en 2016. Repéré par des programmes participatifs ibériques, le lampyre à corselet marqué a été déclaré comme potentiellement invasif et à surveiller par l’Office français de la biodiversité et l’Union internationale pour la conservation de la nature.
À raison de 10 kilomètres par an, l’espèce connaît une expansion rapide pour ce type d’insecte. Autre problème : les larves ne se nourrissent pas de limaces et d’escargots mais de vers oligochètes, les vers de terre indispensables à la vie des sols. « Les vers de terre souffrent déjà d’énormes pressions, notamment à cause d’une autre espèce envahissante, le ver plat. Cela peut être catastrophique, y compris pour l’humain avec des pertes de rendements agricoles et des sols compactés qui augmentent les risques d’inondation », s’inquiète Fabien Verfaillie. L’écologue veut croire « que, localement, le Département ou la Région accepteront de nous accompagner pour comprendre ce qui se passe et évaluer le risque associé au développement de cette espèce ». Une lueur d’espoir.
Pour votre jardin, vous pouvez planter des fleurs grâce aux sachets de tisane qui traînent dans vos placards.
Marjolaine
Vous n’avez pas la main verte et ne savez pas comment égayer simplement votre jardin ? Plantez le contenu de sachets de tisane. Un minimum d’effort pour un maximum d’effet garanti.
JARDIN - Si la période des semis est passée, il est tout de même possible d’embellir votre jardin à l’aide d’une méthode simplissime : planter le contenu des sachets de tisane qui traînent dans vos placards, parfois depuis plusieurs années. Pour cela, il suffit de se saisir d’un sachet de camomille, de nigelle, pavot ou autre plante fleurie. Périmé ou non, peu importe.
Frottez le sachet de tisane entre vos mains pour libérer les graines, dispersez-les sur une parcelle de terre nue en plein soleil, arrosez les bien et le tour est joué. La camomille, connue pour ses propriétés apaisantes et favorisant le sommeil, donne ainsi également de très jolies fleurs blanches, parfumées, semblables à des marguerites, qui égayeront votre pelouse, comme l’explique le HuffPost UK.
Les graines de nigelle donnent elles des fleurs plus fines et délicates, généralement de couleur pastel, parfaites pour combler les espaces vides dans votre jardin. Elles peuvent également être cultivées à côté d’autres fleurs, ce qui permet d’obtenir une végétation diversifiée sans effort.
Une belle pelouse sans effort
Pendant le premier mois ou jusqu’à la floraison, veillez à arroser régulièrement le sol. Une fois qu’elles ont fleuri, ces herbes sont très autonomes et continueront à prospérer d’elles-mêmes. Autre avantage : leur prix, qui est sans comparaison avec celui des graines vendues dans les magasins d’horticulture. Ne serait-ce qu’une demi-cuillère à café peut suffire à donner des tas de plantes.
Les petits sachets remplis de fleurs séchées sont récoltés mécaniquement et contiennent invariablement des têtes de graines mûres. Ces herbes ont presque toutes évolué afin de coloniser des sites ensoleillés, exposés, avec un sol pauvre et des niveaux d’eau bas, ce qui les rend très résistantes et faciles à cultiver. C’est le propre des « mauvaises herbes ».
Un bon exemple est le fenouil, que l’on trouve couramment sur les voies ferrées et dans les tas de décombres. L’aneth, qui est étroitement apparenté, peut être cultivé de la même manière. En tout cas, c’est une méthode facile et écolo de fleurir votre jardin ou jardinière. Et d’une année sur l’autre, les plantes repoussent.
Publié par Alexandre Lafon le 24 avril 2023
La Une du Figaro Magazine du 24 mars attirait l’attention des lecteurs sur quatre animateurs populaires d’émission d’histoire avec ce titre accrocheur : « Ils nous font aimer l’histoire. Pourquoi leurs émissions passionnent les Français ». Stéphane Bern, Lorànt Deutsch, Franck Ferrand et Virginie Girod officient chacune et chacun à la télévision ou à la radio, dans le cadre d’émissions dédiées ou comme chroniqueur : Franck Ferrand intervient sur le plateau des Grosses Têtes sur RTL, par exemple. Stéphane Bern, dans Secrets d’Histoire sur France 3, ou Franck Ferrand raconte sur Radio classique, semblent connaître une belle réussite en termes d’audience, la première fêtant ses quinze ans d’existence.
L’adaptation cinématographique des Trois Mousquetaires d’Alexandre Dumas, en salles depuis le 5 avril, est également l’occasion d’affirmer le triomphe d’une « histoire populaire » dont se régaleraient les Français, en parallèle d’une « histoire universitaire » bien trop éloignée des vraies problématiques historiennes. Stéphane Bern, figure de proue de l’histoire grand public dans les médias audiovisuels, déclare à ce propos : « Depuis les années 1970, à l’école, il est interdit d’enseigner le passé de façon charnelle. L’institution scolaire n’aime plus parler des grands personnages qui ont écrit l’histoire. Or, on ne peut intéresser le public à l’histoire sans l’incarner dans des hommes et des femmes. Les passions qui les animent – le désir de gloire ou de puissance, l’amour – et les épreuves qu’ils affrontent sont intemporelles. » Selon lui, le passé n’est intéressant que s’il raconte, que s’il s’appuie sur le destin de grandes figures, que s’il est présenté à travers le prisme des passions (amour, gloire et… beauté ?). Ainsi, il serait bon, pour le dit « grand public », catégorie aussi imprécise que commode, de ramener l’histoire à un récit passionné du passé des dominants. Bref, de revenir clairement à une histoire biographique des grands hommes (et femmes, tout de même), fondant une chronologie claire d’une histoire glorieuse de la France.
Resservant le discours conservateur d’un « roman national » aux couleurs des rois très chrétiens d’une France éternelle, cette représentation médiatisée semble devoir prendre de plus en plus d’importance dans l’espace public en fustigeant le travail des enseignants des premier et second degrés, et des universitaires. Ces derniers œuvrent pourtant justement à déconstruire ces représentations attachées à une historiographie datée, tout en travaillant à construire une culture commune critique de notre passé national, européen et mondial. Quitte à faire grincer des dents les tenants d’une histoire politisée. L’histoire, passion française, apparaît en effet comme un outil politique de premier choix. Ses usages, notamment médiatiques, disent une époque et une ambiance. La nôtre semblant devoir se plier aux manipulations les plus conservatrices alors même que d’autres voies proposées par des professionnels ou amateurs historiens sont possibles.
Nos « quatre mousquetaires » de l’histoire médiatique contemporaine surfent sur une profonde lame de fond propre à notre nation : la passion de l’histoire. Depuis la Révolution française et le père de l’histoire romantique Jules Michelet, cet intérêt ne se dément pas. La France est une nation qui s’est construite sur son histoire. Au Moyen Âge, les « chroniques de France » offraient un premier écrin au passé d’une même entité : nation, roi et État se confondant. Depuis 1792, les régimes libéraux puis les Républiques ont résolument réinvesti le passé pour dire le pays, le peuple et sa singularité : démocratie, souveraineté populaire, universalisme des droits. La construction de l’État-nation passe par une histoire (et une géographie) commune qui se dessine parfaitement à la fin du XIXe siècle, d’autant qu’après 1870 et la défaite contre la Prusse, il fallait répondre à cette question, développée par le philosophe Ernest Renan : Qu’est-ce qu’une nation ? (1882). Être français devient un « plébiscite de tous les jours » qui s’appuie sur une histoire commune, glorieuse et téléologique : la République représente le point final d’une épopée des grandes heures d’une nation.
L’école sera le berceau de cette histoire-fiction, les manuels scolaires de l’« instituteur national » Ernest Lavisse constituant des médiateurs particulièrement efficaces. Le roman national des grandes figures et de la chronologie fondée sur « nos ancêtres les Gaulois », la monarchie et la Révolution française se développe alors. À travers l’école, l’histoire – qui apparaît dans les lois scolaires de 1881-1882 – devient un pilier républicain. Aujourd’hui encore, elle reste inscrite dans tous les programmes de tous les niveaux, de l’école primaire au lycée général, technologique ou professionnel. Souvenons-nous du tollé qu’avait rencontré, il y a quelques années, le projet de supprimer l’histoire en terminale scientifique : l’histoire est solidement ancrée comme un bien commun, cultivé largement dans l’espace public.
Parallèlement à son usage politique et scolaire, l’histoire a conquis l’université au XIXe siècle, devenant, au XXe, la reine des sciences humaines à travers les œuvres d’un Marc Bloch, d’un Lucien Febvre ou d’un Fernand Braudel. L’histoire profite aussi dans les années 1970 du large mouvement d’ouverture culturelle aux masses démocratisées. Les ouvrages de la Nouvelle Histoire de Georges Duby ou de Jacques Le Goff gagnent le grand public. Montaillou, village occitan, d’Emmanuel Le Roy Ladurie, publié en 1975, connaît un succès retentissant. Les universitaires Alain Decaux, Marc Ferro, Max Gallo ou Pierre Miquel s’invitent à la télévision pour des programmes populaires de grande qualité, parfois en première partie de soirée. Ils sont autant conteurs qu’écrivains, conseillers aussi des politiques pour certains. Le magazine L’Histoire naît en 1979 et devient rapidement la référence en matière d’histoire universitaire transmise au plus grand nombre. Il est aujourd’hui encore plébiscité dans le monde enseignant et dans les foyers éclairés.
Dans les années 1980, la peur de « perdre la mémoire » impose aux historiens une réflexion collective sur les Lieux de mémoire autour de Pierre Nora. La volonté de sauvegarde du patrimoine matériel et immatériel devant l’accélération de l’histoire et de la modernité aboutit à un regain de musées, de journées dédiées aux commémorations et aux patrimoines. Des chantiers sont ouverts autour d’événements moins glorieux du passé national ou problématiques : la grande Révolution n’est-elle pas aussi celle de la Terreur ? La polémique entre le libéral François Furet et le communiste Albert Soboul traverse alors les médiatiques commémorations du bicentenaire de 1989. Dans les années 1990, l’émission Histoire parallèle d’Alexandre Adler, sur la Cinquième, connaît un succès certain : la fin de l’histoire annoncée n’en est pas une. Les émissions documentaires d’Arte par exemple prolongent aussi la qualité des programmes consacrés à l’histoire.
L’arrivée d’Internet démultiplie les supports de diffusion alors que les émissions télévisuelles de plus en plus interactives se modernisent. À la suite de plusieurs autres, la chaîne Youtube Nota Bene, lancée en 2014 par Benjamin Brillaud, devient un marqueur solide de la vulgarisation numérique de l’histoire, prolongeant son succès par des ouvrages grand public. Les podcasts d’histoire actuels, comme Paroles d’Histoire de l’historien André Loez, connaissent aussi une réelle notoriété. La géographie profite de l’excellente émission éducative de vulgarisation Le Dessous des cartes, créée en 1990 par Jean-Christophe Victor. Aujourd’hui largement utilisé dans les classes, ce programme court très pédagogique permet de proposer au public comme aux élèves des mises au point sur les pays, territoires, régions du monde et une ouverture solide de géopolitique.
Ces quelques rappels témoignent de l’épaisseur prégnante de l’histoire dans l’espace public, fondée sur la demande d’une population éduquée à la recevoir, par le biais d’une littérature historique très développée. L’édition, livres ou magazines, et la télévision portent ainsi une histoire médiatique de grande qualité, ouverte sur les problématiques universitaires. Nombre d’auteurs de fiction construisent aussi leur intrigue sur le passé. Sur la Grande Guerre, le centenaire a été l’occasion pour le romancier Pierre Lemaître de recevoir le prix Goncourt avec Au revoir là-haut en 2013. Avant lui, Jean Rouault obtenait le même prix en 1990 sur le même cadre historique pour Les Champs d’honneur. On ne compte plus les auteurs étrangers, nationaux ou locaux qui construisent leur succès sur des intrigues historiques (Cathares, Templiers, Résistance). Ils poursuivent la veine des romans du XIXe siècle dans le sillon des Trois Mousquetaires.
L’histoire reste ainsi le puissant moteur d’une culture partagée et un support de fiction efficace et largement médiatisé. Encore faut-il savoir regarder ce passé avec lucidité et vérité. Longtemps, l’histoire a bénéficié de plumes et de voix pour se porter au-devant d’un large public, sans perdre en route ses attraits : l’examen des sources, la critique et le débat, la puissance du récit fondé sur l’ouverture de problématiques neuves et plurielles, la force des enquêtes utiles à la compréhension et au partage d’un passé souvent problématique (la Shoah, la Résistance ou la collaboration, etc.). À y regarder de plus près, la diversité de l’offre culturelle et médiatique contemporaine d’histoire grand public n’est pas à remettre en cause.
Pourtant, depuis le tournant des années 2000-2010, l’histoire médiatique dite « populaire » a perdu de sa superbe, en particulier à la radio et à la télévision, sur les chaînes et stations les plus regardées et écoutées. Cette période est celle d’un temps de repli identitaire très fort, qui met la nation à mal. Communautarisme d’un côté, nationalisme et xénophobie de l’autre, le passé est pris en tenaille. Il est sommé de prendre position entre le « rôle positif de la France dans la colonisation » ou sur les « mémoires oubliées de l’esclavage ». L’histoire devient polémique et elle est utilisée à cette fin. Les lois mémorielles et le projet avorté d’une Maison de l’histoire de France brouillent le passé et son étude critique. L’histoire devrait-elle s’aseptiser ?
Les programmes « grand public » proposés par Stéphane Bern enclenchent alors un puissant retour en arrière. Les règnes des grands rois, les grandes batailles « fondatrices », les intrigues de cours dessinent une histoire conservatrice, sans peuple agissant, sans tensions sociales, un univers romanesque d’une France des « grands ». Une histoire vulgaire plus que vulgarisée qui n’est en rien de l’histoire. Un certain cinéma politiquement orienté cautionne et prolonge ce rapport délictueux au passé. Vaincre ou mourir, réalisé par Vincent Mottez et Paul Mignot en 2022, en est l’exemple criant.
Pourtant, depuis de nombreuses années, les historiens ont su porter un regard critique sur leur discipline. L’historiographie est devenue une étape obligée dans les études historiennes à l’université. Elle apparaît désormais jusque dans les manuels scolaires du collège et du lycée. Les études universitaires restent d’une grande vivacité et s’arment : un master « histoire publique » consacré à la médiation historique en direction du grand public s’enseigne à Nantes, Créteil ou Albi. L’histoire est désormais l’étude critique du passé et conserve en cela une forte finalité civique. Quelles sont les grandes problématiques historiographiques ? – Montrer que l’histoire est une connaissance toujours actualisée du passé car en lien avec des problématiques actuelles ; – que le « roman national » est une construction politique du passé associée à une période de notre histoire (les travaux de Suzanne Citron ont largement mis en lumière ces errements : angles morts des mémoires populaires, ouvrières, des minorités, construction d’une histoire des dominants sur les dominés, mémoires oubliées des femmes, de l’esclavage) ; – montrer, enfin, que les événements et la chronologie sont des constructions mobilisées par des usages politiques du passé.
Enseigner la chronologie suffit-il à faire de l’histoire ? Certes non, si cette histoire n’est pas problématisée, si elle ne porte pas un sens sur nos propres questionnements. Que Jeanne d’Arc ait été brûlée en 1431 est un fait, mais pourquoi est-ce un événement, que dit-il du rapport entre la religion et le politique au XVe siècle, et de la géopolitique d’alors ? Pourquoi Jeanne d’Arc devient-elle une figure si plurielle dans nos mémoires collectives ? Autant de questions qui permettent de mieux saisir les faits historiques, et non de les porter comme des étendards idéologiques imperméables à la critique.
L’histoire, notamment l’histoire enseignée, n’est plus un catalogue de faits et de personnages « à apprendre par cœur », mais une discipline intellectuelle fondée sur l’étude critique de documents. Elle s’est ouverte à l’histoire sociale et culturelle, à l’histoire des mentalités (dans les années 1980) et à l’histoire des représentations (dans les années 1990 et 2000). Mais sans perdre aussi ce qui fait un de ses charmes : l’art de l’écriture, du récit, de la vie. « Le bon historien, lui, ressemble à l’ogre de la légende. Là où il flaire la chair humaine, il sait que là est son gibier », affirmait Marc Bloch dans Métier d’historien (rédigé entre 1940 et 1943 et publié à titre posthume en 1949 – l’historien résistant ayant été torturé et exécuté par la Gestapo allemande en juin 1944).
L’histoire enseignée est incarnée : le professeur dit à travers des sources les conditions de vie paysanne dans l’Europe du Moyen Âge comme de celles du temps de l’absolutisme sous Louis XIV. Il convoque les témoins de la conquête des Amériques, le journal de bord des explorateurs, la lettre du combattant de 1914. Les élèves abordent au collège le Moyen Âge et l’implantation d’un christianisme qui tout à la fois cimente la société et impose une vision singulière du monde que les humanistes sauront interroger à partir du milieu du XVe siècle. L’Europe chrétienne ? Certes, mais riche d’autres héritages et de brassages culturels, attentive aux apports méditerranéens comme asiatiques. Une mondialisation européenne au XVIe siècle ? Sans doute, mais au prix d’une conquête violente des Amériques et du commerce triangulaire. Une France puissance mondiale au XIXe siècle ? Mais sous couvert d’apporter paix et civilisation en Asie et en Afrique, elle a instauré le travail forcé, la prédation économique et culturelle, un statut inégalitaire entre colons et colonisés. Une France victorieuse en 1918 ? Mais à quel prix et pour quoi ? En étudiant le concept de « sortie de guerre », les élèves comprennent mieux l’idée d’une « victoire endeuillée » et le coût social, politique et culturel d’un conflit mondial qui a durablement affaibli le continent européen.
Au final, ces quelques exemples rapidement exposés montrent combien l’histoire enseignée aujourd’hui, proche des recherches universitaires, dessine une discipline de la réflexion et de la raison. Les cours s’appuient sur des documents : textes, images, statistiques, cartes, objets parfois manipulés en classe. Loin des clichés les plus rances, elle permet aux élèves de se construire comme citoyens éclairés d’un passé complexifié, mais toujours ponctué d’événements rapportés à une culture commune, ouverte. François Ier, Richelieu, Louis XIV ou Napoléon restent des personnages marquants. Mais ils voisinent désormais avec Léonard de Vinci, Calvin, le testament d’un bourgeois du XVIIIe siècle, le témoignage d’un grognard sur les massacres en Espagne de 1808 ou celui d’un simple tonnelier audois, poilu des tranchées. Tous ont voix au chapitre, parce que tous ont fait l’histoire, qui ne mérite pas d’être privatisée par Mme de Pompadour.
Voici quelques pistes de lecture pour nos « quatre mousquetaires médiatiques ». Ces pistes peuvent intéresser d’autres lecteurs. Les historiens, spécialistes de tous horizons (histoire antique ou contemporaine, histoire sociale ou culturelle) ne cessent en effet de travailler, de renouveler leurs problématiques, et de porter leurs recherches hors du champ clos du monde savant. Les ouvrages présentés sont des publications plutôt récentes, portant sur des sujets neufs, généraux ou très spécifiques, mais susceptibles de nous éclairer mieux encore sur notre passé partagé. Elles concernent à la fois les dominants et les dominés, les hommes comme les femmes, les minorités comme les majorités, sans évacuer rigueur du récit et véracité associés à la recherche et à la critique raisonnée. Une histoire inclusive au profit du vivre-ensemble.
– Un manuel incontournable : Douze leçons sur l’histoire, d’Antoine Prost (Seuil, 1996), ou les attendus fondamentaux de la discipline historique posés par l’un de ses meilleurs représentants (histoire sociale, histoire de l’éducation). Antoine Prost évoque en conclusion un « devoir d’histoire » qui mérite encore d’être défendu. Son ouvrage plus récent Si nous vivions en 1913 (Grasset, 2014), fruit d’une chronique sur France Inter, apparaît comme une synthèse vulgarisée de haute voltige de la société française d’avant la Grande Guerre.
– Gérard Noiriel, issu du monde ouvrier, aujourd’hui directeur d’étude à l’Éhéss, a beaucoup travaillé sur l’histoire sociale et populaire : son Histoire populaire de la France, publiée en 2019 aux éditions Agone (Marseille), est désormais devenue un classique, aujourd’hui adaptée en bande dessinée. De la fin du Moyen Âge à aujourd’hui, l’auteur parcourt le territoire de la France actuelle du point de vue des classes populaires et des processus de domination. Le récit est dense, empli de témoignages, de révoltes, de conquêtes et de renoncements. Chaque épisode fait explicitement référence à notre actualité (migration, travail, montée des revendications identitaires).
– Patrick Boucheron avait, voici quelques années, dirigé une Histoire mondiale de la France (Seuil, 2017). Dans Quand l’histoire fait date (Seuil, 2023), fruit d’émissions proposées par Arte, ce professeur d’histoire au Collège de France souhaite « défriser le cours du temps ». L’historien interroge avec bonne humeur : « Je ne sais pas ce qu’est une date importante. Ce que je sais, c’est ce que la mémoire peut en faire ». Voilà un point de départ rafraîchissant qui bouscule nos certitudes. Que révèle l’étude de l’An Mille, pourquoi cette fascination pour Lascaux ou 1347 (la grande peste) ? En 751, Charles Martel, Poitiers ?
– L’historien Michel Pastoureau, spécialiste du Moyen Âge, des couleurs et de leur signification, vient de publier un ouvrage dense intitulé Dernière visite chez le roi Arthur (Seuil, 2023). Ce livre revient sur l’écriture de La vie quotidienne au temps des chevaliers de la Table ronde, son premier livre de jeunesse paru en 1976. De quoi éclairer l’histoire du quotidien au Moyen Âge, l’histoire d’une légende et de ses postérités, mais également l’histoire de l’histoire de l’écriture historienne. Il est donc bien possible de faire rêver un large public à la légende arthurienne (ses dames, ses chevaliers, son épopée) avec rigueur et enchantement.
– La Commune de Paris ? Peut-être un épisode de Secrets d’Histoire… ? D’autant que l’épopée des Communards jouit aujourd’hui de recherches neuves, d’une somme critique refroidie, éloignée des enjeux politiques du XXe siècle (Michel Cordillot (dir.), La Commune de Paris. 1871. Les acteurs, les événements, les lieux, Les Éditions de l’Atelier, 2021). Arte a su présenter un documentaire animé d’une rare beauté intitulé Les damnés de la Commune (2021) en s’appuyant sur la bande dessinée du même nom (Delcourt, 2017-2019). La bande dessinée, art historien dynamique souvent adaptée à la télévision, que portent avec courage et dévouement à la raison les éditions de l’école des loisirs ou Rue de Sèvres.
– Claire Andrieu, professeure d’histoire contemporaine à Sciences Po Paris, publie en 2021 chez Tallandier sa recherche : Tombés du ciel : le sort des pilotes abattus en Europe, 1939-1945. Elle éclaire les actes de résistance populaire durant la Seconde Guerre mondiale. De quoi replacer les populations au cœur des problématiques du phénomène guerrier. Les actes de résistance sont aussi ces actions de l’ombre, loin de la geste gaullienne dont elle fut pourtant un élément trop mis en lumière.
– Finissons ce tour d’horizon par une jeune collection audacieuse, portée par un éditeur toulousain (Éditions midi-pyrénéennes). Il propose des ouvrages de 44 pages, de petit format, synthèses rédigées par des universitaires, sans notes de bas de page. Les thèmes ? Du libertinage à l’arrivée des pieds-noirs en France après la guerre d’Algérie, des Wisigoths à Toulouse à l’essor de l’aéronautique dans la Ville rose. Histoire des femmes, des hommes, des nobles comme des ouvriers. Chaque livre raconte un événement, mais surtout dresse le portrait d’une époque, d’une ambiance. De quoi nourrir et susciter la curiosité, à peu de frais et en tout lieu. Plaisir de la lecture nomade pour concurrencer les réseaux sociaux. https://www.edimip.com/catalogue/ouvrages/essais/catalogue-de-la-collection-cette-annee-la/
Pour conclure, il est navrant que des figures médiatiques de l’audiovisuel public ou privé, sous couvert de répondre à la (fausse) demande de leurs téléspectateurs, de leurs auditeurs, défigurent à ce point le patient travail des historiens et des professeurs qui enseignent tous les jours l’histoire, des éditeurs et réalisateurs de documentaires exigeants. Leur conservatisme et leur représentation de l’histoire nuit finalement au vivre-ensemble. Leur rôle devrait être justement d’amener plus loin et plus haut ceux qui les suivent. Non de flatter leurs représentations faussées ou les amener à penser une France passée caricaturée. En ces temps de transition, souvent douloureux, il serait judicieux qu’ils utilisent leur notoriété pour soutenir la connaissance historique et une histoire inclusive, au lieu de faire de Versailles ou de Poitiers les origines de notre France plurielle.
Alors que les pénuries d’eau s’installent sur l’ensemble de la France, promenons-nous dans la garrigue. Ce milieu typique du pourtour méditerranéen foisonne de plantes adaptées à la sécheresse. Pour autant, il reste menacé.
Nombre de végétaux méditerranéens germent et fleurissent à l’automne. - © David Richard / Reporterre
Ça pique, ça griffe, ça gratte. Sous un soleil déjà vif, notre balade printanière prend vite des airs de parcours du combattant. Slalomer entre les chênes kermès aux feuilles dentelées et les genêts scorpions, veiller à ne pas trébucher sur les rocailles, guetter l’ombre bienfaisante d’un pin. « Bienvenue dans la garrigue ! » dit dans un sourire Thibault Suisse. Notre guide du jour est botaniste au sein des Écologistes de l’Euzière, une association héraultaise qui fait, entre autres, de l’éducation à l’environnement.
« La particularité de ce milieu, c’est qu’il est semi-aride », explique le naturaliste. Et c’est justement ce qui nous amène ici, dans ce massif buissonnant à quelques kilomètres de Montpellier : en ces temps de sécheresse chronique, la région méditerranéenne, qui vit depuis des millénaires sans beaucoup d’eau, fait figure de modèle. Demain peut-être, d’autres zones de France ressembleront à ces collines pelées et étonnantes.
En ces temps de sécheresse chronique, la garrigue, qui vit depuis des millénaires sans beaucoup d’eau, fait figure de modèle en France. © David Richard / Reporterre
L’habit ne fait pas le moine, dit l’adage. Et la garrigue, sous ses allures revêches, cache une multitude d’espèces aux super-pouvoirs. Pour survivre ici, la végétation a en effet dû s’adapter au manque d’eau, aux étés caniculaires, aux feux…
Première singularité, « les plantes d’ici ne perdent pas leurs feuilles, explique Thibault Suisse. Elles les gardent toute l’année pour pouvoir faire de la photosynthèse et se développer dès que les conditions sont optimales ». Nombre de végétaux méditerranéens germent et fleurissent ainsi à l’automne, quand la plupart de leurs congénères continentaux préfèrent le printemps ou l’été. Autre originalité, leur taille : « Plus on est petits, moins a besoin d’eau », précise le naturaliste.
Face aux sécheresses, il s’agit aussi — et surtout — de garder son eau, autrement dit, de ne pas trop transpirer. « Beaucoup d’espèces ont développé la “technique du K-Way”, souligne notre guide. Leurs feuilles sont enduites d’une mince pellicule de cire, qu’on appelle une cuticule. » Avec leur feuillage luisant, le chêne kermès ou le chêne vert suent moins l’été.
Autre astuce imparable : « Le thym ou le romarin ont des feuilles toutes fines, le genévrier cade s’est plutôt doté d’aiguille, décrit le naturaliste. Le genévrier de Phénicie a opté pour des sortes d’écailles. » Différentes options pour un même résultat : réduire la surface d’évapotranspiration.
Le genèvrier cade s’est doté d’épines pour réduire la surface d’évapotranspiration des feuilles. © David Richard / Reporterre
Le botaniste sort de sa poche une petite loupe pour inspecter le dessous pelucheux d’une feuille de romarin. « Ces petits poils ont une double fonction, explique-t-il. Ils font office de double-vitrage pour mieux isoler la plante, et reflètent la lumière du soleil, grâce à leur blancheur. »
La plante aromatique dispose d’un ultime super-pouvoir : ses huiles essentielles. « L’évaporation, ça rafraîchit », rappelle Thibault Suisse, d’où l’agréable sensation de fraîcheur quand on sèche au sortir d’un bain de mer ou de rivière. Mais comment transpirer sans perdre d’eau ? En laissant se volatiliser des corps gras, moins denses que l’or bleu. La garrigue est ainsi parsemée de ces espèces odorantes qui font saliver les promeneurs.
Qui dit milieu sec, dit également risque de feu. Beaucoup de végétaux font donc avec les flammes. Le botaniste évite soigneusement un tapis de fleurs jaunes — des narcisses de garrigue. « C’est une espèce à bulbe, ce qui lui permet d’avoir ses réserves d’eau et de nutriments sous terre », indique-t-il. Pratique en cas d’incendie qui ravagerait la surface.
D’autres plantes, comme les cistes ou l’olivier, se sont particulièrement accommodées des brasiers. « Les graines de ciste germent bien mieux après avoir été soumises à de fortes températures. On peut reproduire ça en les passant au four, développe Thibault Suisse. Quant à l’olivier, ses noyaux se développent très bien dans les cendres. » Il n’est ainsi pas rare de découvrir des jeunes pousses dans les restes grisâtres d’un barbecue où l’on aurait jeté les résidus de l’apéro.
Le naturaliste est insatiable. Il ne cesse de se pencher vers le sol, pointant du doigt ici une salade sauvage, là une jonquille, là-bas une jeune touffe de thym. Contrairement aux apparences, « la garrigue abrite une richesse et une variété végétales remarquables, insiste-t-il. 80 % des quelque 6 000 espèces de plantes connues en France sont présentes ici ». La région méditerranéenne est ainsi ce qu’on nomme « un “hot-spot” de biodiversité ».
Un milieu exceptionnel, mais menacé. Par l’urbanisation galopante et le recul du pastoralisme — les moutons ont longtemps permis de garder ces milieux ouverts, laissant s’épanouir une flore singulière. Mais aussi par le changement climatique. « La végétation est adaptée aux sécheresses estivales, mais pas au manque d’eau chronique et aux sécheresses précoces, en début d’année », souligne John Thompson, écologue au Centre national de la recherche scientifique (CNRS).
D’autant plus que le pourtour méditerranéen se situe aux avant-postes de la crise climatique. « Les espèces peuvent s’adapter, elles ont moins de feuilles par exemple, mais il y a des limites en matière de température et de disponibilité en eau », abonde Isabelle Chuine, directrice de recherche au Centre d’écologie fonctionnelle et évolutive du CNRS.
Reste le déplacement. « Des études menées sur l’ensemble de la flore montre qu’elle remonte vers le nord et les sommets, indique Isabelle Chuine. Le chêne vert, par exemple, se retrouve le long de la façade Atlantique. » Les espèces xérophytes du sud, qui aiment la sécheresses, pourraient ainsi se disséminer dans certaines zones de l’ouest et du centre de la France.
Alors, garrigue partout ? « Ce n’est pas si simple, nuance John Thompson. Il y a d’autres facteurs qui jouent : les sols appropriés par exemple. » Il faut aussi que les végétaux puissent essaimer, grâce aux pollinisateurs ou aux oiseaux. « Le déclin des insectes, les barrières que constituent les routes, les villes freinent ce processus… On empêche la nature de se déplacer », prévient le chercheur.
La région méditerranéenne semble bien condamnée à la mutation. « La végétation pourrait se modifier et ressembler à celle de l’Andalousie ou de l’Afrique du Nord, esquisse Isabelle Chuine. Moins dense, plus pauvre d’un point de vue biodiversité. » D’ici la fin du siècle, la garrigue pourrait peu à peu laisser place à un milieu semi-désertique.
L'historien local AndréTardy estime que les vestiges de Telo Martius découverts à Besagne en 1987 sont une fausse piste. Il défend une hypothèse puisée dans un ouvrage du XIXe siècle
Publié par Mathieu Dalaine le 11 avril 2023
Fermons les yeux et imaginons. Imaginons cette bourgade antique de 3.000 habitants nichée au cœur d’une rade magnifique. Imaginons cette petite ville qui vit au rythme de ses échoppes. Les enfilades de maisons sont ici ponctuées de villas luxueuses, de fontaines reliées à la source Telo, au pied du Faron. Imaginons ce port où se vendent vin, huile, cuir et autres étoffes teintes aux navires venus de tout l’empire romain. Imaginons-le… mais où?
Longue de 6 à 8mètres, les barques romaines découvertes à l’occasion de la construction du centre Mayol en 1987 seraient la preuve de l’existence du port antique de Toulon, selon les archéologues. Mais pas d’après l’historien local André-Jean Tardy. Photo DR
"Le port romain de Telo Martius était à Castigneau, dans l’actuelle enceinte militaire", assure aujourd’hui André Tardy. D’après l’ancien directeur de la régie municipale des eaux, historien à ses heures (1), la théorie communément admise, qui voudrait qu’un port antique ait été implanté entre l’actuel centre commercial Mayol et la place de l’Équerre, est erronée.
En rouge, l'emplacement supposé du port antique par l'historien local André-Jean Tardy. En bleu, l'emplacement du port découvert par les archéologues. En vert, la cité antique.
Sauf que pour les archéologues, le fait est entendu depuis plus de trente ans. Depuis la découverte en 1987 de barques romaines à Besagne, entre autres vestiges dénichés lors de larges fouilles dans le centre ancien, preuve serait faite de l’implantation d’un port antique à cet endroit. L’an dernier, un ouvrage sur le sujet, intitulé Toulon (Telo Martius), une agglomération portuaire romaine de la cité d’Arles, a même été édité aux Presses universitaires de Provence.
"Je ne conteste pas ce qui a été exhumé dans les années quatre-vingt, pose André Tardy. Mais on parle là d’un débarcadère composé de deux barques chargées de pierres, puis coulées, ainsi que d’un alignement de troncs de chênes! Dire que cette fruste réalisation serait un port fait offense à l’ingénierie maritime romaine." Le Toulonnais brandit le tome I d’Histoire de Toulon, un livre écrit en 1886 par un certain Gustave Lambert. "Il y rapporte les communications, à leur ministre respectif, de deux hommes de l’art, directeurs des fortifications de Vauban, qui évoquent à 65 ans d’écart la mise au jour de débris de quais romains. Cela à du sens."
Et d’argumenter: "L’existence d’un aqueduc entre Telo et Castigneau a été attestée. On peut imaginer que cette eau approvisionnait une teinturerie éloignée du centre urbain pour limiter les nuisances. Rappelons que c’est cette activité économique – la teinture d’étoffe – ainsi que le négoce de vin et d’olives, qui a permis au port de Telo Martius de se développer."
Problème: aucune trace de ces quais n’a été retrouvée à l’époque contemporaine. Tout cela aurait été détruit par les agrandissements successifs du complexe militaire, croit savoir André Tardy
"On ne fait pas l’histoire avec des théories ou une approche émotionnelle, balaye Marina Valente, directrice du Centre archéologique du Var. Que Monsieur Tardy apporte des preuves! Nous – des archéologues, un professeur au Collège de France, une directrice de recherche au CNRS… – on a des preuves matérielles, documentées et datées. Telo Martius n’était sans doute pas un port aussi important que Fréjus, mais si cela avait été le cas, il aurait été cartographié…"
Du haut de ses 87 ans, fort d’un caractère trempé, André Tardy ne craint pas plus l’adversité qu’un procès en érudition. Défendant son "étude de cinquante pages" qu’il vient d’achever, il n’en démord pas: "C’est à Castigneau, où a été mis à profit un grau sur la rive gauche de l’estuaire du Las, qu’a été construit le port romain."
Quid, alors, des installations découvertes dans le centre-ville? "Vers -50, le port gréco-romain d’Olbia, à Hyères, est devenu inabordable. C’est à Toulon que les Obliens ont probablement trouvé l’emplacement le mieux adapté pour continuer leur négoce. À Telo Martius, co-existèrent deux ports: l’un de commerce, à Besagne, réalisé à la hâte; l’autre à Castigneau, d’État, militaire, réalisé par l’ingénierie romaine, à la charge de l’empire."
Horeiae vs Horiae
C'est un autre combat, toponymique celui-ci, que mène André Tardy depuis des années. "Le nom des barques romaines retrouvées à Besagne n'est pas Horeia, mais Horia", assure-t-il, contre vents et marées.
L'historien local en veut pour preuve le fait qu'Horia soit un mot attesté en langue latine signifiant barque de pêcheur d'après le dictionnaire Gaffiot. Le terme Horeia, lui, a été découvert sur une mosaïque réalisée en Tunisie, représentant un petit bateau similaire aux embarcations toulonnaises. D'où le nom de baptême choisi par les archéologues. Mais pour André Tardy, il s'agit possiblement là d'"une erreur orthographique du scribe".
C'est ainsi qu'il y a 30 ans, le Toulonnais s'est rendu en mairie pour interpeller le service municipal dédié aux noms de ruess. "Il y a cet escalier le long de Mayol, entre la place des Mûriers et la place Besagne, qui était baptisé Montée des Horeiae. J'ai tout expliqué au fonctionnaire qui a accepté de corriger la plaque en mettant Horiae !" (Horia au plueirl, ndlr).
Au fil de ses recherches, André Jean Tardy s'est également interrogé sur l'origine du nom romain de Toulon, "Telo Martius". Si Telo évoque un dieu celte qu désigne l'actuelle source Saint-Antoine, autour de laquelle le premier foyer de population s'est créé, Martius, lui, ne serait pas une référence au dieu latin de la guerre d'après l'historien toulonnais, qui entend -là encore !- tordre le cou à la version officielle.
Seuls deux ports portent le nom de Martius en Méditerranée ! Narbo Martius, soit Narbonne, et Telo Martius, soit Toulon, pose André Tardy. Or Narbonne fut le premier port de Rome fondé en terre étrangère. Pour marquer le coup, l'empire a sans doute voulu accoler au nom indigène Narbo, le second terme d'Ancus Martius, qui fut, selon la légende, le roi fondateur d'ostie, premier port de Rome.
Poursuivant son raisonnement, l'ancien directeur du service des eaux pense que Toulon a eu droit aux mêmes honneurs, lorsque le port de Narbonne est parti en fumée. "En 145, un gigantesque incendie a détruit la quasi totalité de la ville. Afin de continuer les vocations narbonnaises -port et teinturerie-, l'empereur Antonin a ordonné la création d'un port et d'un ensemble industriel à Toulon. C'est là qu'il a probablement choisi de lui accoler le terme Martius..."
Une hypothèse qui accréditerait, du coup, celle de l'existence d'un port d'envergure au pied du Faron... et contredirait de fait la théorie de sa localisation à Besagne, où les installations retrouvées paraissaient plus sommaires.
1. André Tardy est notamment l’auteur d’Histoire de Toulon, de Telo à Amphitria (5 tomes).
Que ce soit pour chercher des informations, se connecter à son compte bancaire, consulter ses remboursements de dépenses de santé, déclarer ses impôts ou réserver un billet de transport, les outils numériques sont indispensables à la vie quotidienne. Si la numérisation facilite la vie de la plupart des citoyens au quotidien, elle complique celle des personnes en difficulté avec les outils numériques.
En 2019, en Provence-Alpes-Côte d’Azur, environ 660.000 personnes âgées de 15 ans ou plus sont en situation d’illectronisme, soit une personne sur six, selon une étude publiée ce mardi par l’Insee Paca. C’est-à-dire qu’elle ne possède aucune capacité numérique ou n’a pas utilisé internet dans l’année.
Cela représente environ 16% des habitants de cette classe d’âge, comme en France métropolitaine.
Aux personnes en situation d’illectronisme s’ajoutent environ 1,4 million d’habitants de la région (33% des 15 ans ou plus) ayant une faible maîtrise des outils numériques. Leurs usages d’internet et des outils numériques sont peu diversifiés et ils sont plus vulnérables aux virus ou aux arnaques.
Au total, presque la moitié des habitants de Paca (49%) sont en situation d’illectronisme ou de faible maîtrise des outils numériques, soit un taux proche de la moyenne de France métropolitaine (47%).
L’usage quotidien d’internet, tout comme la forte maîtrise des outils numériques, diminuent progressivement avec l’âge. Parmi les 15 à 29 ans, 82% se connectent tous les jours et 47% possèdent une forte maîtrise alors que c’est le cas de respectivement 10% et moins de 1% des personnes âgées de 80 ans ou plus.
L’illectronisme concerne également en priorité les moins diplômés.
Le taux d’illectronisme est plus fort dans l’arrière-pays que dans les métropoles.
NDLR (assistée de Wikipédia et de ChatGPT) : que sont devenues les cyberbases, comme celle que nous avions au Revest jusqu'en 2014 ?
Les Cyberbases sont des centres d'accès public à l'informatique et à l'Internet, créés en France dans les années 2000 dans le cadre d'un programme national d'inclusion numérique. Ces centres offraient des formations et des ateliers pour initier les personnes à l'utilisation de l'informatique et d'Internet. Cyber-base est un label français d'espace public numérique, géré par la Caisse des dépôts et consignations. Ce dispositif national a pris fin le 31 décembre 2014.
Depuis leur création, les Cyberbases ont connu une évolution et une adaptation aux changements technologiques. Aujourd'hui, les Cyberbases ont été remplacées par des espaces numériques de travail, des FabLabs et des tiers-lieux numériques.
Les espaces numériques de travail offrent des services similaires à ceux des Cyberbases, avec des formations et des ateliers pour apprendre à utiliser les outils numériques. Les FabLabs sont des espaces de fabrication numérique, où les utilisateurs peuvent utiliser des machines et des outils pour concevoir et produire des objets. Les tiers-lieux numériques sont des espaces de travail partagés pour les professionnels et les entrepreneurs, équipés de technologies de pointe pour faciliter la collaboration et la communication.
En résumé, les Cyberbases ont été remplacées par des espaces numériques plus modernes et adaptés aux besoins actuels des utilisateurs.
D’où vient l’eau? Quelle part est captée pour nos usages? Qui sont les plus gros consommateurs? On fait le point.
Publié par P.-H. C. le 30/03/2023
Le lac de Sainte-Croix. Photo archives Var-matin
La surface du département du Var accuse 5 973 km2 et en moyenne son sol a reçu 456 millimètres de pluie en 2022 selon les relevés.
À la louche, on peut donc estimer qu’il est donc tombé plus de 2,7 milliards de mètres cubes d’eau dans le Var.
Attention cependant à ne pas croire que toute cette flotte est disponible.
Selon les experts, 60 % de cette pluie, soit 1,6 milliard de mètres cubes, est repartie illico dans l’atmosphère, simplement évaporée. Il n’en reste plus que 1,2 milliard disponible pour s’infiltrer dans les nappes phréatiques (23 % du volume) ou ruisseler (16 %).
1,2 milliard, c’est aussi précisément ce que le département a prélevé selon les chiffres publiés pour l’année 2020 par la banque nationale des prélèvements quantitatifs en eau (BNPE).
Au fil des ans, ce volume évolue fortement. En 2017, par exemple, nous nous sommes contentés de 739 millions de mètres cubes... mais nous en avons englouti 1,5 milliard l’année suivante.
Évidemment, tout n’est pas passé par votre tuyauterie.
75 % est constitué de ce que la BNPE qualifie d’eau turbinée, c’est-à-dire celle qui fait tourner les turbines des barrages hydroélectrique. Dans le Var, il s’agit de Quinson et Saint-Cassien.
Face à ce poids lourd, l’eau potable ne constitue que 15 % du volume, l’irrigation 3,7 %, les canaux et l’usage industriel 2,9 % chacun.
Infographie Rina Uzan -Var-Matin
Le Var compte 250 points de prélèvement d’eau potable répartis sur tout le territoire. On a en tiré 193 millions de mètres cubes en 2020.
Plus gros robinet du Var, la prise de Boutre, dans le canal EDF, à Vinon-sur-Verdon, a fourni plus de la moitié de l’eau potable consommée dans le Var (voir tableau des 15 plus importants prélèvements).
Si le volume global des prélèvements connaît de fortes variations, celui de la consommation d’eau potable est en revanche assez régulier.
Sur les cinq dernières années publiées, il oscille de 181 millions (en 2016) à 199 (en 2017). En 2020, les compteurs indiquaient 193 millions.
Évidemment - et on peut s’en irriter - ce n’est pas parce que l’eau est potable qu’on la boit. Les études estiment que 7 % seulement de ce qui coule au robinet d’un ménage est utilisé pour l’alimentation, dont 1 % pour la boisson. Les bains et douches engloutissent 39 % du volume, devant les sanitaires (20 %), le linge (12 %) et la vaisselle (10 %)
Au moment où la sécheresse inquiète, les regards accusateurs se tournent vers les piscines.
La direction des finances publiques en a comptabilisé en 2021 très exactement 106 764 dans le département. Près de 15 % des logements ont leur bassin. Dans certaines communes varoises, c’est nettement plus. Les Adrets-de-l’Estérel, Cotignac et Saint-Paul-en-Forêt affichent une concentration trois fois supérieure avec 45 % des logements équipés. Un luxe qui pèse forcément sur la soif.
Le volume moyen des bassins en France est de 48 mètres cubes pour la remplir à ras bord. Le premier remplissage fait donc sérieusement couler le robinet. D’autant que, dans le meilleur des cas, il faut y ajouter près de 16 m3 par an pour compenser l’évaporation (estimée à un tiers du volume total).
Garder tous les bassins à niveau doit donc tutoyer 1,7 million de mètres cubes par an. Un chiffre à rapporter aux près de 200 millions de mètres cubes d’eau potable consommés dans le Var.
Nettement plus énervant en fait que les piscines, on peut s’intéresser aux innombrables fuites que connaissent nos réseaux.
L’Observatoire national des services de l’eau évalue à 87 % le rendement des réseaux varois. En clair, 13 % de l’eau potable introduite dans les tuyaux se perd avant d’arriver au robinet, grosso modo 25 millions de mètres cubes par an!
Le Varois, gros consommateur
69,3 mètres cubes par an et par habitant. C’est la consommation moyenne d’un Varois. C’est plus que la moyenne nationale puisque l’Observatoire des services publics d’eau et d’assainissement estime que chaque Français utilise en moyenne 149 litres d’eau potable par jour, soit une consommation domestique de 54,3 m3 par habitant et par an.
Notons cependant que ces chiffres sont forcément un peu faussés par l’afflux de touristes estivaux. Non seulement, ils ne figurent pas - par nature - dans le nombre d’habitants, mais en plus, l’Ademe estime qu’un vacancier consomme 65 % de plus qu’un local.
Le 20 mars, c’est la journée de la francophonie ! L’occasion de rappeler que la diffusion internationale de la langue française a commencé dès le Moyen Âge. En réalité, cette diffusion est alors tellement importante qu’y réfléchir, comme le fait l’historien Thierry Dutour dans son dernier ouvrage, revient à repenser le concept même de «France».
Le « français » médiéval, qui bien sûr n’est pas celui que nous parlons maintenant, est extrêmement diffusé. Il faut dire que dès le XIe siècle, des nobles francophones ont entrepris des conquêtes territoriales importantes, emportant avec eux leur langue : les Normands s’emparent ainsi des Pouilles puis de la Sicile, de l’Angleterre puis de l’Irlande. Avec les croisades, des États latins d’Orient sont fondés, dans lesquels on parle, entre autres, le français : en Syrie d’abord, puis en Palestine, à Chypre et enfin, après 1204, en Grèce et en particulier au sud, dans la région de Morée. Dans le même temps, le français picard est parlé par une large partie de la population dans les anciens Pays-Bas.
Cette diffusion est soutenue par une circulation intense d’hommes et de femmes : étudiants, soldats, clercs, musiciens, marchands, etc. Les manuscrits, les idées, les techniques voyagent dans une Europe médiévale bien plus ouverte, dynamique et connectée qu’on ne le pense souvent. Largement parlé, le français reste une langue de l’élite : en 1307, à Hereford, une petite ville à l’ouest de l’Angleterre, les ruraux témoignent en anglais, les citadins en anglais et en français, les clercs en français et en latin.
Il faut dire que les médiévaux maîtrisent souvent plusieurs langues. Il n’est pas rare que les nobles en parlent couramment trois ou quatre et, parmi ces langues, le français fait souvent bonne figure. Il apparaît dans les documents de la pratique (les chartes, les testaments, etc.) au début du XIIe siècle, et il commence à concurrencer le latin dans les relations diplomatiques à la fin du XIIIe siècle. Quand le doge de Venise écrit au sultan d’Alep en 1254, il le fait en français, et c’est dans cette langue que le sultan lui répond.
D’une manière surprenante, le français s’invente… hors de France. L’adjectif « français », utilisé pour décrire la langue, est ainsi utilisé pour la première fois par… un Anglais ! C’est en effet Philippe de Thaon qui écrit en 1113 un Comput (ouvrage servant à fixer les dates des fêtes religieuses), texte destiné au roi d’Angleterre mais rédigé dans ce qu’on appelle le français insulaire, que Philippe dit être « la langue parlée de notre pays ». Dans ce texte, il utilise 14 fois le terme « français » pour désigner la langue (sans ambiguïté, comme quand il écrit « en français, on appelle ça… »). C’est également en Angleterre que le français devient une langue littéraire, lorsque la Chanson de Roland est mise par écrit (début du XIIe siècle).
La première poétesse en langue française est elle aussi une Anglaise : Clémence de Barking, moniale dans une abbaye à l’est de Londres, qui rédige une Vie de sainte Catherine d’Alexandrie. Qui connaît son nom aujourd’hui ?
Dans son dernier ouvrage, intitulé La France hors la France. L’identité avant la nation (Vendémiaire, 2022), Thierry Dutour ne se contente pas de retracer l’histoire de cette diffusion internationale du français, de l’Irlande à la Syrie. Il explique que cette diffusion doit nous inviter à penser autrement l’histoire de France et, notamment, à nous méfier de la tentation consistant à projeter dans le passé les concepts contemporains d’identité nationale et politique.
Pour nous, en effet, « être français » signifie « être né et vivre en France », donc à l’intérieur des limites du territoire politique. Cette définition, souligne Thierry Dutour, est étroitement liée à l’importance de l’État : le territoire politique, c’est celui que contrôle et donc définit l’État. Appliquée au Moyen Âge, cette définition nous invite à réserver le terme de « Français » à ceux qui sont sujets du roi de France.
Or, quand on s’intéresse à la langue, on voit que cela ne fonctionne pas. En 1224, le pape Honorius III dit que la Grèce est une « nova Francia », une nouvelle France. En 1507, un chanoine de Lisieux explique que les nobles de Chypre sont « aussi bons français que ceux de France ». Pourtant, ces nobles vivent à Chypre depuis plus de trois siècles. C’est comme si on disait, aujourd’hui, que les habitants du Québec sont Français : cela étonnerait, voire choquerait, alors que c’est totalement normal pour un habitant du Moyen Âge. On peut donc, à l’époque, être français, et même « bon français », sans jamais avoir mis un pied en France et sans du tout relever de l’autorité du roi de France.
La pluralité linguistique est alors la règle. Dans l’autre sens, le royaume de France se compose lui-même d’une multitude de langues, ce que le latin médiéval appelle des « nations ». Il n’y a donc pas de lien et, en tout cas, pas de superposition entre le territoire politique et les territoires linguistiques. Si cette idée nous semble étrange, c’est que les nationalismes du XIXe siècle nous ont au contraire habitués à penser les deux ensemble. La France est devenue à la fois une nation et un État-nation, et l’emprise de ces termes sur nos pensées est tellement forte que nous avons du mal à penser d’autres manières d’être Français.
L’analyse attentive du cadre médiéval permet donc, comme y invite avec force Thierry Dutour, de comprendre qu’une identité culturelle française a existé avant et indépendamment de l’identité politique française : « Alors se découvre un monde français à la fois proche et profondément autre. Effacé de la mémoire civique et assez largement de la mémoire historique, il nous paraît différent au point d’en sembler opaque et presque étranger. »
Pour en savoir plus
– Benoît Grévin, Le Parchemin des cieux. Essai sur le Moyen Âge du langage, Paris, Seuil, 2012.
– Thierry Dutour, La France hors la France. L’identité avant la nation, Vendémiaire, 2022.
Le Loup de Saint-Jean-du-Var- DR
"Nous étions allés voir un film à La Garde et, en rentrant à Toulon au niveau du quartier de Saint-Jean-du-Var, j’ai vu comme un animal gris et blanc qui n’était pas du tout apeuré par notre voiture qui avançait vers lui. J’ai cru à un chien mais non: c’était bien un loup!"
Robert circulait avec sa petite-fille, vers minuit, lorsqu’il a surpris la course de ce loup, visiblement perdu. "On n’a pas eu peur mais on a été très surpris. Jamais vu ça avant! Surtout si près des habitations. Avec notre téléphone, on a tout filmé avant qu’il ne disparaisse", explique-t-il.
"Quand on voit le comportement de l’animal sur la vidéo, tout indique qu’il s’agit d’un loup", analyse Eric Hansen, directeur de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) pour la région Paca-Corse.
"On le constate: le loup est un peu désorienté et cherche un moyen de s’enfuir. Sa présence dans une zone périurbaine est étonnante mais pas exceptionnelle. Une vingtaine de meutes de loups existe dans le Var. Bien sûr, leur habitat naturel est en zone rurale, dans les collines, mais le loup a des capacités d’adaptation géographique importantes."
Pourquoi le trouve-t-on si près du centre-ville? "Il a peut-être été attiré par des proies possibles comme les sangliers qui sont de plus en plus nombreux aux abords des villes. En Italie, par exemple, on a localisé récemment une meute de loups qui s’était carrément installée en plein milieu urbain. Les animaux ont finalement été réintroduits à la campagne. Dans notre région, on a dénombré 50 loups qui ont provoqué des accidents de la route à force d’être trop près des axes."
Pour l’association Ferus, qui milite pour la protection et la conservation des loups, l’hypothèse d’un "animal uniquement de passage" n’est pas à exclure. "Mais l’homme n’a rien à craindre d’un loup qui pénètre dans une zone urbaine. Aucun incident n’a jamais été répertorié."
Nicolas Jean, ingénieur et coordinateur de la brigade loup, est lui aussi formel: "il s’agit bien d’un loup. On ne le sait pas toujours mais ce genre d’animal se déplace beaucoup et vite. Il peut parcourir entre 30 et 40km par jour. Cette présence du canidé à Toulon ne représente pas de danger mais va nous servir pour nos études."
Et les spécialistes de mettre en garde contre toute confusion: "Il arrive souvent qu’on prenne pour des loups des animaux qui leur ressemblent comme le chien-loup tchèque ou le chien Saarloos. C’est tout à fait différent."
Le loup aperçu à Toulon ce week-end est-il une exception? "Non", selon une association F. D. Var-Matin 27 mars 2023
Depuis deux jours, les réactions se multiplient après la découverte d’un loup qui errait à l’entrée du quartier de Saint-Jean du Var à Toulon, dans la nuit de vendredi à samedi.
Un Toulonnais a filmé sa petite balade en zone urbaine, avant qu’il ne disparaisse.
Tous les spécialistes sont d’accord pour dire qu’il s’agit bien d’un loup qui s’est aventuré tout près du centre-ville de Toulon.
"C’est d’autant plus plausible qu’actuellement, c’est la saison où les jeunes loups quittent leur meute et s’en vont pour chercher une compagne et un territoire. Pour cela, ils doivent traverser des routes, ce qui occasionne souvent des collisions avec les véhicules", explique Sandrine Andrieux, l'une des responsables de Ferus, l’association de protection et de conservation des loups.
Pour elle, il n’y a rien d’extraordinaire à la présence de loups aux abords de la ville: "On sait qu’il y a des loups dans la campagne du Revest ou de Solliès-Ville. Nous avons aussi eu des signalements au niveau du plateau de Signes. Et le printemps correspond à la saison où les jeunes loups se déplacent beaucoup. Comme les renards ou les sangliers, ils peuvent s’égarer en ville. Celui de vendredi soir s’est probablement égaré et a dû retrouver les monts toulonnais à l’heure qu’il est."
Publié par Mathieu Dalaine le 28 mars 2023
Brachychitons acerifolius, chitalpas de Tashkent, hibiscus de l’île de Norfolk… Début mars, de nouvelles espèces de feuillus aux noms particulièrement poétiques ont fait leur apparition le long des plages du Mourillon.
Au total, ce sont ainsi plus d’une centaine d’arbres que la Ville a plantés sur les pelouses du littoral.
"Il s’agit non seulement de remplacer ceux qui sont morts mais aussi de développer le patrimoine végétal", précise Luc de Saint-Sernin, l’élu en charge de cette opération.
Système d’arrosage "intelligent" à l’appui, plus d’un millier de troncs habille désormais l’espace vert le plus fréquenté de Toulon. Mais pas n’importe lesquels.
"Même s’il arrive encore qu’on les remplace, on a de moins en moins recours aux palmiers, par exemple", poursuit l’élu, qui évoque "le fléau" du charançon. On privilégie des essences, méditerranéennes ou exotiques – beaucoup viennent d’Océanie – qui produisent plus d’ombre et qui semblent mieux adaptées au changement climatique.
Économes en eau, plus résistants à la chaleur et pourvoyeurs de fraîcheur sont les vertus cardinales célébrées par le service espaces verts de la Ville, qui les sélectionne du côté des serres municipales à La Garde. Le fait de s’accommoder d’une forte exposition au vent et aux embruns est aussi une qualité non négligeable.
Le secteur des plages du Mourillon n’est pas le seul concerné par cette opération verte.
Purau de Thahiti. Photo DR.
"Pour cette campagne de printemps, ce sont quelque 400 arbres qui ont été plantés en ville", poursuit l’adjoint. Et de citer le parvis du Zénith ou l’avenue le Chatelier comme zones bénéficiaires de ce "renouvellement du patrimoine".
Micocouliers, cyprès, camphriers, peupliers, oliviers, tilleuls ou mûriers-platanes sont les espèces "stars". Exit les pins, dont les racines maltraitent la chaussée, ou le platane, victime du chancre coloré.
"D’une manière générale, à cause des épidémies, on évite désormais les grands alignements d’arbres identiques", note Luc de Saint-Sernin.
Coût de l’opération: 850.000 euros, systèmes d’entretien et aménagements périphériques compris.
À noter qu’une nouvelle campagne de plantation aura lieu en octobre, où le parvis de la fac de droit, pour ne citer que lui, devrait enrichir la canopée de la capitale du Var.
Brachychitons acerifolius. Photo DR.
Parmi les espèces qui ont fait l’apparition sur les plages du Mourillon, voici cinq arbres qui devraient attirer l’attention:
le brachychitons acerifolius, arbre subtropical originaire de la côte orientale de l’Australie;
le purau de Tahiti, dont les fleurs ont la particularité de changer de couleur durant la journée, de jaune pâle à rouge à la tombée de la nuit;
Chitalpa de Tashkent. Photo DR.
Tulipier du Gabon. Photo DR.
Arbre de Noël de Nouvelle-Zélande. Photo DR.
Zéro déchet - Dessin de Coté, paru dans Le Soleil, Québec
Hé oui, l'histoire continue à être écrite par les hommes. C'était pas bien difficile de trouver des historiennes pourtant! Ya encore du boulot.
21e Édition du Prix du Sénat du Livre d’Histoire - Vendredi 17 mars 2023
Le jury du Prix du Sénat du livre d’Histoire, présidé par M. Jean-Noël JEANNENEY, a présélectionné les 8 ouvrages suivants (par ordre alphabétique des auteurs) :
Un monde sans ressources - Besoin et société en Europe (XIe-XIVe siècles), Mathieu ARNOUX (Albin Michel)
Les illuminati – De la société secrète aux théories du complot, Pierre-Yves BEAUREPAIRE (Tallandier)
La fabrique des huguenots – Une minorité entre histoire et mémoire (XVIIIe-XXIe siècle), Patrick CABANEL (Labor et Fides)
Images de France, Léonard DAUPHANT (Passés composés)
Stupéfiant Moyen-Orient – Une histoire de drogue, de pouvoir et de société, Jean-Pierre FILIU (Seuil)
La Rafle du Vél d’Hiv – Paris, juillet 1942, Laurent JOLY (Grasset)
À poings fermés – Une histoire de la boxe antique, Jean-Manuel ROUBINEAU (PUF)
La remise du Prix au lauréat, ouverte à la presse, se déroulera le mardi 20 juin 2023 dans les Salons de Boffrand de la Présidence, sous le haut patronage de M. Gérard LARCHER, Président du Sénat.
Il est le seul et unique site retenu par la Mission Patrimoine dans toute la région Paca. L'Institut de biologie marine Michel Pacha de La Seyne-sur-Mer, édifice emblématique de la corniche de Tamaris construit de 1891 à 1899 et appartenant à l'Université Claude Bernard Lyon 1, a bien besoin d'une cure de jouvence.
Publié le 16/03/2023 par Elodie Madoré (avec M.G.)
L'Institut de biologie marine Michel Pacha de La Seyne-sur-Mer est né de la rencontre entre le mécène et bâtisseur Michel Pacha, et le professeur Raphaël Dubois. Photo archives Var-matin
En 2022, David Tine, directeur du patrimoine de l’université lyonnaise, détaillait le projet de restauration dans nos colonnes. Le bâtiment principal de style ottoman, dessiné par l'architecte suisse Paul Page, accueillera "des salles de réunion, des bureaux et des espaces de convivialité. Le bâtiment Pérès, situé sur la droite (et qui ne présente pas de caractère patrimonial, Ndlr), sera reconstruit pour y aménager un lieu de restauration et d’hébergement, ainsi que l’amphithéâtre. En lien avec le projet de réhabilitation de la corniche de Tamaris, le programme prévoit aussi de valoriser les espaces paysagers situés à l’arrière du bâtiment", avait-il indiqué.
Depuis 2008, l'Université de Lyon y a cessé ses activités de recherche en présentiel. Le CNRS y avait installé par la suite le projet Antarès (un télescope à neutrinos immergé en Méditerranée).
"C'est une grande fierté que l’Institut de biologie marine soit le seul site emblématique de toute la région à être retenu pour l’édition 2023 de la mission patrimoine. C’est aussi une immense satisfaction car, depuis des années, je me bats pour que ce lieu exceptionnel soit requalifié et obtienne la reconnaissance qu’il mérite", a réagi Nathalie Bicais, maire de La Seyne-sur-Mer.
Le montant de la dotation de chaque site sera annoncé lors des prochaines Journées européennes du patrimoine qui auront lieu en septembre. L'édile pense que ce se seront "a priori plusieurs centaines de milliers d’euros". "Ils aideront à financer le projet évalué à 6 millions par l’Université de Lyon, qui doit, précise-t-elle, en apporter la moitié, l’autre étant apportée par la Région, le Département et la Ville."
Les travaux de restauration patrimoniale et de reconstruction de l'Institut débuteront en septembre 2024 et devraient s'achever en janvier 2026. "Après des années d’aléas juridiques et de contexte économique défavorable, son projet de réhabilitation est désormais lancé", souffle la maire.
La Mission Patrimoine détaille dans un communiqué la nature des travaux à effectuer: "Le bâtiment historique dit "Dubois" sera entièrement restauré". Cela passera par "la consolidation de la structure métallique en fondation, la révision complète des toitures, charpente et zinguerie, le traitement des fissures, la réfection des enduits en façade, la réouverture des baies bouchées, la repose de menuiseries et restitution des volets".
Elle souligne que "les éléments de décor, gypseries, menuiseries néo-ottomanes, frises en céramique, etc. seront restaurés à l’identique".
En ce qui concerne le bâtiment plus récent de 1968, dit "Pérès" et celui des ateliers en bordure de parcelle, ils seront également réhabilités tout comme les jardins aménagés, mais ces travaux-là ne seront pas opérés par la Mission Patrimoine.
Cette recommandation intervient alors que la situation continue de se dégrader pour les oiseaux : près de la moitié des espèces sont en déclin dans le monde.
Publié le 17/03/2023
Roitelet triple bandeau - Photo © Cécile Di Costanzo
Pour laisser les oiseaux nidifier tranquillement, l'Office français pour la biodiversité (OFB) recommande, vendredi 17 mars, de ne pas tailler les haies au moins jusqu'à la fin du mois d'août. "L'OFB encourage les collectivités, les professionnels et les particuliers à éviter la taille des haies et l'élagage des arbres de début mars à fin août pour ne pas déranger ou déloger les oiseaux pendant cette période cruciale de leur cycle de vie", écrit l'office public dans un communiqué.
Cette recommandation intervient alors que la situation continue de se dégrader pour les oiseaux : près de la moitié des espèces sont en déclin dans le monde et une sur huit est menacée d'extinction, déplorait en septembre l'ONG internationale BirdLife dans son rapport de référence (en anglais). L'OFB prône également d'éviter tout arrachage de haie et souligne qu'il n'est pas nécessaire de les tailler chaque année. Les haies sont "championnes de la biodiversité" et "peuvent accueillir jusqu'à 35 espèces de mammifères, 80 espèces d'oiseaux, huit espèces de chauves-souris, 15 espèces de reptiles-amphibiens ou 100 espèces d'insectes", souligne-t-il. Pour les agriculteurs, la taille des haies est interdite pendant plusieurs mois, également pour protéger la reproduction et la nidification des oiseaux.
Photo © Cécile Di Costanzo
Sous le pseudo Rebecca Lighieri ou sous son vrai nom Emmanuelle Bayamack-Tam, la Revestoise à mi-temps s’inspire de la vie du village pour offrir aux lecteurs, au théâtre et bientôt à l’écran son talent d’écriture. Rencontre.
Emmanuelle Bayamack-Tam, plus connue sous son pseudonyme Rebecca Lighieri
Depuis ses deux ans, Emmanuelle Bayamack-Tam, qui écrit également sous le pseudo Rebecca Lighieri, passe ses vacances et des week-ends à la maison familiale. La table des cafés est son bureau et les villageois sont des sources d’inspiration. Avec la signature de dix-sept ouvrages à son actif et de nombreux prix, l’année 2022 a été riche d’émotion et de reconnaissance.
Et les projets vont bon train. Attablée avec son ordinateur et son café dans un coin du bar du Vieux Château du village chez Rémi, la Revestoise d’adoption femme de lettres revient sur cette année 2022.
Quelle année 2022 !
Oui. Cela a débuté avec le prix Landerneau, qui est une récompense des lecteurs de l’enseigne Leclerc. J’en suis très contente, car ce sont les lecteurs des espaces culturels de tous les magasins Leclerc implantés dans toute la France qui ont voté pour mon roman La Treizième heure. C’est une belle reconnaissance que j’ai vécue en octobre dernier. Ensuite, je savais que j’étais nominé pour le prix Médicis décerné en novembre.
Racontez-nous cette journée particulière...
Nous n’étions plus que quatre auteurs en lice. Le jour du 8 novembre, date de l’annonce des résultats, je me suis rendu chez mon éditeur. Quand il a reçu le coup de fil qui m’annonçait qu’il m’était attribué, ce fut super. On a trinqué au champagne. J’ai appelé mes parents qui vivent au Revest. Ils étaient très fiers et très contents. Mon papa Francis était directeur de l’école d’ostéopathie et ma maman Christiane était professeur de latin-grec, tous les deux à Marseille. Ma grand-mère maternelle était la cousine germaine de Marius Hermitte, le père de Jacqueline Aude. J’étais une enfant de la ville, qui allait à la campagne pour un voyage exotique, où Marius élevait ses lapins dans ce village au pied des falaises du mont Caume. Ce climat, cette lumière. Les gens d’ici ne sont pas à plaindre.
Est-ce qu’un tel prix ça change une vie?
Il y a beaucoup de sollicitations, d’invitations en France et même au Canada. Je suis professeure de français au lycée du Kremlin-Bicêtre en région parisienne. Je vais mettre cette activité professionnelle en veille pour me consacrer pleinement à l’écriture. Je suis enseignante depuis trente-cinq ans. Déjà, j’ai adapté certains romans au théâtre. De nouveaux projets s’ouvrent pour moi.
Pouvez-vous parler de certains projets?
Je pense terminer un nouveau roman sous mon pseudo Rebecca Lighieri à paraître pour 2024. De plus, sous le titre Windigo, je fais paraître un roman jeunesse qui se déroule à Marseille pour septembre 2023. Je finis d’écrire une pièce de théâtre sur Michael Jackson et Britney Spears. C’est un projet que j’avais depuis longtemps. J’ai "mon" Michael Jackson, en la personne du comédien Pierre-Adrien Lefèvre. Il fallait quelqu’un qui l’incarne parfaitement. La pièce se produira bientôt dans un théâtre parisien. On m’a proposé d’être la voix off d’un film. Ce projet me plaît bien.
2013: prix Alexandre-Vialatte, Ouest-France pour Si tout n’a pas péri avec mon innocence.
2017: prix roman de l’été pour Les Garçons de l’été édition P.O.L.
2019: prix Inter pour Arcadie édition P.O.L.
2022: prix des lycéens du Pays de la Loire pour Il est des Hommes qui se perdront toujours édition P.O.L.; prix Landerneau et prix Médicis pour La Treizième heure édition P.O.L.
La défense de l'environnement passe aussi par les petits gestes du quotidien. Une canette de soda négligemment jetée dans la nature raconte ses déboires.
Publié le 11/03/2023 par Éric Neri
Canette - photo DR
Je suis mignonne, tout en aluminium. J’ai une taille de guêpe et un poids constant. Je suis une canette de soda. Mon volume est de 33 cl.
Nous ne sommes pas toutes pareilles dans la famille. Certaines de mes congénères se glissent dans une poche ou tout au contraire ont de l’embonpoint pour étancher de grandes soifs.
J’ai envahi, il y a quelques décennies, les rayons des supermarchés et les comptoirs des bars, détrônant les petites bouteilles en verre ou en plastique.
Mes collègues qui contiennent des aliments solides n’ont pas la chance d’avoir un gracieux petit nom comme moi. On les appelle des boîtes de conserve. Pas très glamour.
Avec mon joli minois, je pourrais, j’en suis sûre, être sélectionnée au festival de cane(tte), à l’affiche du prochain film de Guillaume Canet. Bon, j’entends déjà certains qui ricanent, j’arrête de me faire mon cinéma.
Aujourd’hui, me voilà gisant dans l’herbe, au ras des pâquerettes. Je suis vidée, épuisée depuis que mon opercule a été ouvert par une traction sur l’anneau avec lequel je suis indéfectiblement liée depuis ma naissance.
J’ai beaucoup à me faire pardonner: je contenais une boisson gorgée de sucres
L’ado qui m’a laissé choir en pleine nature, après m’avoir consommée par petites gorgées, n’a pourtant que le nom de Greta Thunberg à la bouche. Il ne manque aucun de ses faits et gestes sur les réseaux sociaux.
A la première occasion de mettre en pratique son discours, le voilà aux abonnés absents ! J’entends déjà ses objections, c’est toujours la même rengaine: “Qu’on s’occupe d’abord des gros pollueurs qui bousillent la planète et s’en mettent plein les poches.” Je crois également aux petits ruisseaux qui font de grandes rivières, si chacun fait sa part, à son échelle.
Je suis très engagée dans la défense de l’environnement, d’autant que j’ai beaucoup à me faire pardonner. Je contenais une boisson gorgée de sucres.
Mes collègues, outre-Atlantique, portent une bonne part de responsabilité dans l’obésité de millions d’Américains. Je crains que, chez nous aussi, de moins en moins de consommateurs ne résistent à l’appétit vorace des multinationales de l’agroalimentaire.
Si rien ne se passe, je vais dépérir pendant au moins cent ans dans la nature. Pourtant, comme les hindous, je crois en la réincarnation, pour peu que mes propriétaires successifs prennent soin de moi en me recyclant.
Je peux avoir sept vies au moins en intégrant tour à tour une voiture, une véranda, un TGV, une barquette alimentaire... Pourquoi me priver de toutes ces expériences exaltantes?
J’attends que quelqu’un me tende une main secourable et me jette dans une poubelle jaune (NDLR : grise au Revest). La planète sera préservée et mon avenir assuré.
Orchidées, papillons, arbres remarquables...
En petit groupe, dans un magnifique parc, je vous propose de venir découvrir les notions essentielles de la photographie de nature.À l’issue de cette journée, vous serez en mesure de créer une image harmonieuse, originale et parfois insolite !
Au plaisir de vous rencontrer
Cécile Di Costanzo
Photographe faune et flore
Renseignements et inscriptions
cecile.imagenature@laposte.net
06 89 01 61 95