La roche calcaire est la reine des garrigues méridionales.
Les défrichements séculaires, le mouton et l'agressivité du climat l'ont mise partout en évidence. Elle est dure, saillante, souvent acérée. La pierre, omniprésente sur les sentiers, sonne sous le pied. Elle dessine les barres rocheuses, les baous chers à Pagnol, comme les combes qui rythment les paysages de Cuers à la Sainte Baume.
Durant plus de 100 millions d'années, pendant l'ère secondaire, la mer a occupé une grande partie de la Provence. Elle y a déposé d'épaisses couches de calcaire provenant des coquilles d'invertébrés marins, superposées en strates de différentes hauteurs. Un mètre d'épaisseur représente, selon la profondeur de la mer, entre 2000 à 100 000 ans de dépôts.
Chaque strate épaisse ou fine, dure ou friable, claire ou rougeâtre, à grains fins ou grossiers, chaque strate est un enregistrement des conditions environnementales d'une époque : climat, profondeur de la mer, relief du continent voisin... Une faible profondeur, une mer chaude, une longue période de même niveau marin sont en général les conditions les plus propices à la constitution d'une sédimentation calcaire épaisse.
Une caractéristique majeure des massifs calcaires est leur grande, leur intense fracturation. Elle va de la minuscule fissure au gouffre le plus large, en passant par l'aven caché sous les herbes et les ronces. En surface le carbonate de calcium dissous par les pluies, acidifiées par l'humus des sols, est vite entrainé par l'excellent drainage des calcaires crevassés.
Ne restent sur place, piégées dans les creux et les poches, que des argiles, non solubles, qui sont une impureté du calcaire originel.
Le climat méditerranéen, fait de précipitations brutales et brèves, suivies de longues périodes de sécheresse, favorise l'oxydation du fer que contiennent les argiles. Plus le climat est chaud, plus l'oxydation est forte et le sol rougeâtre. Quand ces sols sont épais et ne contiennent pas de calcaire, ces sols sont très fertiles. D'où parfois ces labours au fond de petites combes.
Le mot garrigue, à l'origine ancienne, désignait des territoires fortement anthropisés, des territoires fortement marqués par l'activité humaine. Aujourd'hui, les jeunes forêts de chênes et de pins s'installent sur les garrigues, mais l'homme qui a délaissé ces territoires, conserve cette appellation. Une nostalgie, une habitude ? Peut être... La plupart de ces espaces évolue rapidement mais, pour l'homme, ils demeurent la garrigue.
Ces territoires anthropisés étaient jadis le domaine des chaufourniers (chaux, poix, cade, les enguentiés), des charbonniers, des chasseurs à la glu, au filet, au fusil, des cueilleurs d'asperges, salades, petit bois, des fabricants de balais, des gemmeurs, et cela principalement autour des villes et tout au long de la côte.
Il faut cependant, tout en respectant l'attachement au mot, discerner les plantes qui aujourd'hui colonisent les terrains calcaires de ces garrigues millénaires : pelouses, forêts, et entre eux deux, ces espaces ouverts où dominent les plantes ligneuses et qui ne sont plus des pelouses et pas encore des forêts, et que la communauté scientifique qualifie sous le mot d'origine espagnole, matorral. Le matorral c'est cet espace sans arbre que colonisent cyste, genet, calycotome, coronille, bruyère, chêne kermès..
En Provence le matorral présente une grande diversité : le Chêne kermès, la Coronille à tige de jonc, le Genêt scorpion s'associent aux arbustes tel le Filaire à feuilles étroites, le Pistachier térébinthe, le Cade... tandis que la pelouse où jadis courrait le mouton, se couvre de Brachypode rameux, de Thym, de Lavande...
Les garrigues s'étagent de la mer à la limite de l'Olivier, zone où les plantes des terrains arides ont disparu. Au delà, sur les plateaux calcaires d'altitude moyenne, comme les coteaux du Ventoux, les formations végétales proches en apparence ne peuvent plus s'appeler garrigues, terme réservé à la zone méditerranéenne telle que définie par la limite de croissance de l'Olivier, selon la définition reconnue du botaniste Charles Flahault (1852 - 1935).
Le Chêne vert ou la Cigale plébéienne, illustres représentant du monde méditerranéen, auraient pu être choisis pour définir cette zone, mais... ils se retrouvent dans d'autres régions. La Camphorée de Montpellier, par contre, couvre le même périmètre que l'Olivier mais... mais la Camphorée ne porte pas sur sa corolle autant de symboles que l'Olivier.
En cela nous devons remercier Homère !
Mardi 9 octobre, de gros orages traversent le Var...mais au matin, mercredi, le ciel est dégagé : départ Le Revest 8h20. Direction le Verdon en suivant le GR 99.
Au dessus du Revest, la rade de Toulon au loin
Sur la droite tu laisses, au milieu de grands arbres, une grande demeure qui domine le Revest. Une plaque indique que de Lattre de Tassigny, à la tête de son régiment de tirailleurs algériens, fit la jonction avec les troupes de la résistance du Var dans cette maison. Et décida la libération de Toulon.
La carrière est au dessus de toi. Le crissement des chenilles sur la roche te ramène à la libération : tu imagines un tank là, à la manœuvre...
Le sentier suit un ancien chemin muletier, la roche porte en quelques rares endroits la trace du roulage des chariots. Ses empreintes sont visibles sur les seules parties amont du chemin; les parties aval ont été détruites par l'érosion : plus de 40 cm emportés! La pente a favorisé ravinement et excavation.
Tu es sur la crête, le Mont Caume à gauche, Roca Troca à ta droite, blanc de cailloux, quasi pelé. La rade de Toulon est visible entre Faron et Baou des Quatre Aures. Au col débute le plateau de Siou Blanc. La chênaie est basse. Un chasseur te dépasse dans un Lada, des cages à appelants sont empilées à l'arrière. Un camion forestier, sans train arrière, rouille, abandonné au croisement de pistes. Tu traverses plusieurs coupes. Les rochers de Siou Blanc se dressent comme des moines figés...De minuscules dépressions tapissées d'herbes vertes et tendres bordent le chemin. Elles constitueraient des lieux rêvés pour bivouacs .
Siou Blanc, les roches comme des moines blancs figés...
Tu coupes la route forestière, traverses les plantations de l'ONF, direction l'abri de Siou Blanc.
Siou Blanc, les plantations de l'ONF : la végétation change..
11 heures : fromage et figatelli...
Siou Blanc, l'abri...la pause repas
Puis direction Nord et Ouest : le GR suit la ligne des crêtes, contourne la ferme de la Limate et plonge vers Signe. Raide, non entretenu, le sentier est barré en de multiples endroits par des arbres ou branches tombés.
Les crêtes...Mazaugues quelque part en bas, la montagne de la Loube au fond
Là tu perds le tracé du GR et prends une piste nord parallèle à une ligne à haute tension et te retrouves sur la crête...au lieu dit le Mourié d'Agnis, au dessus de la bastide de Taillane et des ruines de la Taoule posées au milieu de prés...vue magnifique de la Sainte Baume, la Loube...
Du Mourié d'Agnis, vue sur la Taoule
Tu suis le tracé jaune, contournes le champ de La Croix et te diriges vers La Venelle, le long de la piste forestière. Tu es à 6 kms de Mazaugues. Dans la boue du chemin, les marques de sabots de sangliers pullulent...Dans la courbe de Bagatelle, une source, un réservoir bâti... une restanque, un espace dégagé au milieu d'un cercle de chanterelles... il est 19h30 fourbu tu t'arrêtes, montes la tente, te douches, et prépares le repas...
Jusqu'à 10h du soir ce ne sera que pépiements, hululements, chuintements, caquètements et autres cris d'oiseaux ! quelle idée de poser le sac à coté d'une source ! Où les sangliers viendront boire à 4 h du matin !!
Bagatelle : le bivouac près de la source aux oiseaux et sangliers...
De Mazaugues au Caramy, le chemin traverse les terres de bauxite...
5h30 : bruit de moteur : arrivée des premiers chasseurs ...
7h20 - 9h00 : coups de fusil.
10 h : bar de Mazaugues, lecture de la presse, café.
Entre les affleurements calcaires la bauxite demeure dans des poches. Avec la pluie, l'oxyde de fer apporte les couleurs de Lubéron, et ses rouges plus ou moins sombres. La verdure et le calcaire ont un nouveau partenaire.
Au dessus de St Maximin et du Caramy et du pont romain de Cassède, la chapelle de St Probace.
Le GR serpente et suit la courbe vers l'Est du Caramy. Une longue descente vers la plaine de St Maximin et Brignoles, vers la vigne. La chapelle de St Probace domine la vallée. Chênes et érables commencent à perdre leur premier feuillage
13h : pause devant le Mas de Loube.
9h de marche hier, 3h ce matin...
Sur le GR 100 m plus loin, un lapin surgit à tes pieds : plus rapide, il s'esquive dans le talus avant que tu ne puisses le photographier.
Le chemin traverse les vignes. Le raisin chauffé en plein soleil ne désaltère pas.
Le Caramy ou l'heure du bain...
Enfin, le Caramy ! tu le passes à gué. L'eau murmure sur le radier et miroite sous le feuillage. La fraicheur invite à la baignade. Un champ de vignes suit le torrent, tu le longes, sous le soleil, et, au premier passage, tu sautes sous les arbres rejoindre eau et fraicheur. Ce sera un bain !
Mais à Bras, tu arrêtes : 70 kms cela suffit !
GR 99 : Fin de la 1ère partie