Fabien Baïardi (à droite) avec Lionnel Astier dans la série "Alex Hugo".
Publié le 13 octobre 2021 à 13h56 Par Raphaël Coiffier rcoiffier@nicematin.fr
Le comédien, installé au village du Revest depuis quinze ans, s'épanouit dans la saga policière rurale, "Alex Hugo". Il a tourné des scènes du dernier épisode au Thoronet. Parole au policier.
Fabien Baïardi a le sourire. Ce sourire tendre et carnassier. Charmeur et inquiétant. Comme l’eau du geyser encore endormie. Dans les profondeurs de l’être. Prête à jaillir au crépuscule de la patience... Il est ce compagnon d’un soir. Affable et farceur. À la terrasse d’un café. Moulin à paroles. Mordant et mordu. À l’instinct grégaire. Tant que l’autre n’empiète pas sur son humble caractère.
Il est vous. Il est moi. Lorsque le soleil s’endort sur Le Revest. Son village adopté lorsqu’il tournait, à Saint-Tropez, Sous le soleil. La petite porte des artistes. Poussée de l’auriculaire. Jusqu’à en devenir une pièce majeure. Il y a 15 ans. Déjà.
Il était flic. Beau gosse. "Le faire-valoir de service." Pas encore le méchant. "Le dégueulasse.". Le voyou. La gueule de l’emploi. Il était ici. Dans Le Bureau des légendes. Là. Dans De rouille et d’os. Il était à l’image. Des salles obscures. En couleurs. De nos écrans plats. Il est acteur. Tout simplement... "Parce que je suis une feignasse, rigole-t-il en vous désarçonnant.
"Un oisif romantique." Qui dès 11 ans écrivait des poèmes parfumés. Qui dès 14 ans, jouait Titus à Lyon. Planches homériques de son tremplin artistique. "On me disait 'tu as du charisme'. On m’envoyait de l’amour. Pour un gars comme moi, aux parents séparés, ça me faisait du bien." D’attraper au vol des morceaux de bienveillance. Comme lorsqu’il chantait avec son meilleur pote. Dans la rue. Intrigant le chaland éphémère, de sa voix de baryton Martin.
Martin-pêcheur parti barouder, aussi, un an au Vietnam. Pourquoi? "Pourquoi pas. J’ai écrit un bouquin là-bas." Coupé le cordon avec les répliques. Les lumières tamisées. Avant de s’en revenir à "ce luxe qu’est le métier de comédien.".
De trimbaler sa carcasse de casting en casting. De picorer les rôles. Jusqu’à tomber sur Leblanc. Le Leblanc. De la série Alex Hugo. Le juste. Brigadier gentil. Généreux. "Mon clone. Presque à 100%. Il y a une sorte de fusion avec ce personnage." Une complémentarité avec Lionnel Astier, interprète du policier Angelo. "C’est mon maître. Je le kiffe!"
De l’eau a coulé sous les ponts des campagnes depuis le premier épisode. La Mort et la belle vie, tourné en 2014. Une paille. Pire, une meule de foin où le Baïardi n’était alors que passager de travelling. Un coup de vent médiatique... Sauf qu’au fil des saisons, il a trouvé sa place dans ces grands espaces. "Les réalisateurs, notamment Pierre Isoard, Olivier Langlois, puis Muriel Aubin, m’ont fait confiance. Leblanc s’est imposé."
Ainsi que le comédien. À l’aise dans ces décors naturels. En famille, avec les équipes de tournage. Admiratif de Samuel Le Bihan. "Au premier rôle taillé au scalpel pour lui. Ce mec est terrible. Humain. À l’écoute. Et il n’a pas la grosse tête, comme certains dans ce milieu..."
Lui non plus ne pète pas plus haut que son cul. À l’opposé des percussionnistes du septième art. Musiciens de la bien-pensance et chefs d’orchestre de l’entre-soi. "Participer à une partouze à Paris, le nez plein de coco, pour obtenir un rôle, très peu pour moi. Je force le trait, mais c’est vrai que dans ce microcosme, c’est très centralisé. Vivre là-bas, ça me tuerait. Je ne troquerais pas mon village pour Oberkampf..."
Lui préfère la terre. L’authenticité. La mer. Les balades. Les apéros avec les copains. S’occuper de son petit bonhomme, Enki. Son Revest, quoi. "Je me suis même inspiré de sa police municipale pour Alex Hugo." Son fil rouge artistique. Dont le dernier opus, le 22e de la collection, a été tourné en partie au Thoronet.
La Fille de l’hiver. "C’est un western rural. Haletant. Comme hors du temps. Le premier sous la neige." Que le plus Varois des Lyonnais ne spoilera pas. "Vous devrez attendre sa diffusion, bientôt (1)." Par jour de grand froid. Pour être raccord.
"Vous ne serez pas déçu." Comment l’être, tant cette série du service public s’éloigne des sentiers battus. "On est dans le noble. Dans le retour au terroir. Pas du tout dans les fléaux de la ville. Je crois que c’est ce qui plaît aux gens."
Ce qui lui plaît aussi. "Arrêter Alex Hugo? Non. C’est trop bien. D’ailleurs quand le tournage prend fin, je suis mal. C’est comme quand ta nana te largue. Tu as un manque." Pour le combler, Fabien va au marché. Cuisine. Regarde un match de l’OL. Ou du RCT. "Mon cœur est à la fois rouge et bleu et rouge et noir."
Un cœur gros comme ça. Celui d’un mec les pieds sur Terre. N’hésitant pas à vous dire: "Je peux gagner un Smic par jour alors qu’il fallait un mois à mon grand-père pour la même somme. Je suis conscient de la chance que j’ai. Alors ne comptez pas sur moi pour me plaindre." Pour sûr, il y a du Leblanc en Baïardi...
1. L’épisode La Fille de l’hiver sera diffusé aujourd’hui en avant-première à Canneseries.
Un projet avec Samir Bouallegue et une série Netflix
S’il se voit bien, un jour, jouer une comédie musicale, Fabien Baïardi planche depuis un bon moment sur un projet de long métrage avec, à la baguette, le réalisateur Samir Bouallegue.
"C’est le rêve de ma vie. Le film est écrit. Ce sera l’histoire d’une quête identitaire. Un road-trip contemporain. Totalement décalé. Un univers un peu dégueulasse mais touchant."
Pour Fabien, collaborer avec Samir était une évidence. "Ce mec est un génie et on va y arriver."
En attendant, l’acteur sera à l’affiche de la série Gone for Good (Disparu à jamais), prochainement sur Netflix.