Les Gillet ont acheté le domaine de Tourris au Revest aux enchères en 1998. Plus de vingt ans après, ils sont enfin venus à bout de sa réfection. Un rêve d’enfant devenu réalité.
Ne lui parlez surtout pas de contrainte! René Gillet n’est là que pour s’amuser. Là, c’est dans son domaine de Tourris, au Revest, qu’il a acheté aux enchères il y a vingt ans et dont il finit tout juste la réfection.
Alors que la rénovation de la chapelle de 1608 s’achève, le propriétaire se dit "trop heureux de cet aboutissement": "Je le vis comme un enfant."
C’est justement depuis le plus jeune âge que cet entrepreneur breton rêve d’être un jour châtelain. "Quand j’étais petit, j’allais à la messe dans le Morbihan tous les dimanches et il y avait un comte. Mais on ne pouvait voir son château, caché derrière un mur. Alors je me disais que ce n’était pas grave, qu’un jour j’aurai mon château."
Le désir d’enfance devient réalité lorsque René et son épouse Mireille achètent le domaine revestois aux enchères en 1998. "Nous cherchions un domaine qui fasse dans les cent hectares, avec un château, de l’eau et qui soit abonné."
À l’époque, presque plus rien ne se passe à Tourris depuis déjà cinquante ans.
Le terrain fait 96 hectares, compte une source, douze puits et trois bassins. Et, bien sûr, un château avec tourelle et deux étages en plus du rez-de-chaussée.
Quelque 350.000 euros plus tard (en francs à l’époque), René réalise son rêve et devient châtelain. "C’est mon terrain de jeu!" Mais il a fallu du temps et des travaux pour redonner au domaine ses lettres de noblesse.
D’abord le rez-de-chaussée de la demeure de maître en 2001, puis ses étages en 2006, 2007. Les extérieurs - la cave, le reposoir, la bergerie - ont été rénovés à partir de 2015 et le terrain restructuré.
Les vignes, elles, avaient été plantées un peu en amont. Pour cet amateur de bonne chère, faire du vin était une évidence.
Boucher de formation et à la tête de NovoViandes, l’entreprise créée en 1974 et qui compte aujourd’hui 35 magasins autour de Paris et cinq cents employés en région parisienne, il propose désormais, les breuvages qui vont avec.
Ainsi, depuis maintenant huit ans, des bouteilles estampillées Saint-Jean-Baptiste de Tourris sortent de la cave de René Gillet. Avec ses deux hectares, il a même atteint le seuil des dix mille bouteilles dans les trois couleurs, que l’on peut découvrir les vendredis de 14 heures à 16 heures.
Avec le sentier de randonnée qui passe par le domaine, ce sont les deux seules possibilités pour apercevoir la rénovation menée ici. Non pas qu’il tienne à le garder des yeux du public, mais l’ouvrir, sous forme de chambre d’hôte par exemple, représenterait trop de contraintes pour René Gillet.
Et lui, tout ce qu’il veut, c’est le plaisir!
La belle restauration de la chapelle
Sur son site web, il cite Goethe: "Souviens-toi de vivre."
Autant dire que la philosophie affichée par Rémy Potey, restaurateur de peinture murale et auteur de la rénovation de la chapelle du domaine de Tourris, colle parfaitement avec la quête de plaisir et d’amusement de René Gillet. "Cette envie de mordre dans la vie est un dénominateur commun."
C’est en effet une vraie rencontre avec le propriétaire que l’artiste a vécue. "Le visage et le sourire de René Gillet ne me quitteront plus." Pas plus que le peintre du XIXe siècle, "probablement italien", auteur des décors à moitié effacés, ne l’a quitté pendant qu’il leur redonnait vie.
Rémy Potey, pendant près de quatre mois, sept jours sur sept, dix à onze heures par jour, a travaillé d’arrache-pied mais avec passion à restaurer cette chapelle dont une partie du toit était effondrée. "J’ai passé un mois et demi la tête à l’envers pour les peintures de la voûte", insiste-t-il.
Son dernier coup de pinceau, il l’a employé à rétablir la date des derniers décors visibles: 1865. Comme un hommage à leur auteur précédent.
D’abord autodidacte, Rémy Potey s’est finalement formé, en 1998, à la peinture murale au Centre international d’études pour la conservation et la restauration des biens culturels, à Rome, fondé par l’Unesco. Il a alors eu l’occasion de travailler sur le plafond de la chapelle Sixtine.
Autant dire que les chanceux qui ont reçu une invitation à l’inauguration du domaine le samedi 1er juin, pourront découvrir un travail d’orfèvre. Y compris, le cadran solaire que Rémy Potey a peint sur l’une des façades du château, et dont il est l’un des rares spécialistes.
des siècles d'histoire
Le château et son domaine datent du XVIe siècle. Jusqu’à la révolution française, ils appartiennent à la famille Nas de Tourris, des nobles qui, craignant d’être décapités, quittent la France pour La Réunion. Certains de leurs descendants vivraient encore non loin.
Dans les années 1860, le domaine appartient à M. Tessier, un industriel. Il devient ensuite, en 1892, propriété de la famille Degasquet, avant d’être racheté par un autre industriel dans les années 1950, à partir desquelles le château sera en déclin, jusqu’à son acquisition par René et Mireille Gillet.