Des découvertes archéologiques ont été réalisées par des chercheurs du Département en marge de la construction d’un ensemble commercial, boulevard Saint-Exupéry à Draguignan.
Publié le 02 mai 2022 à 14h40 Par Jérémy PASTOR
Cette découverte est totalement fortuite, puisqu’aucune fouille préventive n’était prévue", explique un archéologue. Photo DR / SDA Var et Ville de Draguignan.
Des découvertes historiques inattendues ont été faites récemment sur le boulevard Saint-Exupéry. "Nous avons trouvé une installation viticole datant de l’empire romain, ainsi que les restes d’une voie romaine", détaille Patrick Digelmann, archéologue du Département, qui a
dirigé des fouilles pendant cinq semaines, de janvier à fin février. Les trouvailles ont été réalisées pendant le terrassement du terrain qui accueillera prochainement un complexe commercial, dont l’ouverture est prévue au premier trimestre prochain.
"Cette découverte est totalement fortuite, puisqu’aucune fouille préventive n’était prévue", explique le chercheur.
En effet, lorsqu’un permis de construire est déposé, il doit être étudié par la préfecture de région. "À l’aide de zonages de prescriptions archéologiques édictés par la Direction régionale des affaires culturelles (Drac), il est décidé si des fouilles doivent être réalisées ou non", précise Patrick Digelmann. "Cela n’a pas été le cas à Draguignan."
Première étape, il fallait définir l’ampleur du site.
"Nous l’avons évalué en décembre dernier à l’aide d’une pelle mécanique", commence-t-il. "Au total, le site s’étalait sur 1.500 à 1.800 m². Une partie au sud-est date de l’époque romaine. Des fosses, au sud-ouest, remontent de la fin de l’Âge du bronze (-2700 à -800) ou au début de l’Âge du fer (-800 à 0)."
Les travaux d’archéologie ont débuté en urgence après le début du chantier de construction d’un centre commercial, sur le site duquel on a découvert des vestiges enfouis. Photo DR / SDA Var et Ville de Draguignan.
Après une série de sondages et la remise d’un rapport à l’État, la Drac a donc prescrit en urgence une fouille de sauvetage du site à proximité de Saint-Hermentaire. "Nous avions la possibilité de le faire, le Département s’est donc proposé pour réaliser ces fouilles", détaille l’archéologue.
Sur le site, il a dirigé sept personnes pendant cinq semaines afin de percer les mystères, dont certaines trouvailles datant du premier âge du fer (voir ci-dessous). "Nous devions déterrer, documenter et prélever le maximum d’élément dans un délai très court", indique Patrick Digelmann.
Les découvertes ont été nombreuses. « Nous avons pu identifier un domaine rural de l’époque romaine, sur lequel se trouvait une ferme viticole composée de deux unités de pressurage", décrit le chercheur.
"Il y avait un chai, lieu permettant la vinification, dans lequel se trouvaient de grandes jarres en céramique qui permettent de stocker le vin."
La structure était a priori composée de deux ailes organisées autour d’une grande cour fermée par un mur de clôture: "Au nord, se trouvait la partie habitation, dans laquelle nous avons retrouvé de la vaisselle en céramique et des objets de la vie quotidienne. À l’est se trouvait
l’atelier de pressurage et de stockage du vin."
L’équipe du Département a même eu la surprise de trouver les restes d’une voie romaine, le long du boulevard Saint-Exupéry. "D’une largeur de 4 m, celle-ci devait relier la villa de Saint-Hermentaire, puis le pont de Lorgues."
Selon les chercheurs, ces trouvailles dateraient du haut Empire romain, à savoir entre le début du Ier et le IIIe siècle de notre ère.
Les découvertes de l’équipe d’archéologues du Département ne se sont pas arrêtées au site romain antique. "Nous avons également trouvé des structures qui proviennent de la fin de l’Âge du bronze et du premier Âge du fer", annonce Patrick Digelmann, archéologue du département qui a dirigé les fouilles sur le site dracénois.
"Nous avons fouillé des foyers allongés à radiers de pierre de deux mètres de long et 60 centimètres de large, disposés en batterie", décrit le chercheur. 'Ils permettaient par exemple la cuisson de viandes, le grillage des grains ou d’accueillir des repas collectifs."
Des petites fosses de curage des foyers ont pu également être découvertes avec des résidus de charbon à l’intérieur. "Il y avait deux niveaux d’occupation superposés, avec la présence de trous de calages de poteaux, nécessaires à la construction d’habitations plus récentes, des VIe ou Ve siècle avant notre ère", estime-t-il.
"Nous avons prélevé les sédiments et l’ensemble des artéfacts présents dans ces fosses, que nous allons analyser, identifier et situer précisément à l’aide de la datation au carbone 14." Un travail de longue haleine, dont les conclusions complètes pourront être connues d’ici
deux ans. "Ce n’est que le début", sourit Patrick Digelmann.
"Ce sauvetage d’urgence, réalisé en cinq semaines contre les dix nécessaires, a été rendu possible grâce au concours de l’ensemble des acteurs : le recrutement rapide d’archéologues par le Département, la mise à disposition d’une base de vie et d’engins pour creuser et sonder, ou encore le prêt d’un drone par la Ville pour les prises de vues aériennes", salue le chercheur.
Les éléments découverts vont faire l’objet de datations précises qui permettront d’affiner les
hypothèses. Photo DR / SDA Var et Ville de Draguignan